1 mars 2007

[Abbé Philippe Laguérie, ibp (blog)] A propos du M.A.S.D.U ?

SOURCE - Abbé Philippe Laguérie, ibp (blog) - 1er mars 2007

Monsieur l’Abbé, 
Pourriez vous me dire, s’il vous plaît, si oui ou non le M.A.S.D.U. (Mouvement d’Animation Spirituelle de la Démocratie Universelle) dénoncé par Mr l’Abbé de Nantes comme étant l’utopie politico-religieuse de la pensée du pape Paul VI est toujours présent actuellement dans l’Eglise. 
Ne s’agit’il pas plutôt d’une interprétation ou d’une manipulation de la pensée du Pape Paul VI par l’abbé de Nantes (la dialectique est une arme dangereuse!)? 
Je me fais une joie de venir à Courtalain samedi pour les ordinations, je vous ai déjà rencontré il y a trois mois alors que la Télévision était sur place. J’ai la chance de ne pas être très éloignée géographiquement. 
Je vous assure de ma prière pour vos deux nouveaux prêtres et pour la bonne continuation de votre oeuvre qui m’apparaît nécessaire pour le renouveau de la Tradition. Il arrive un moment, nous devons dire "non possumus" car nous ne pouvons pas aller plus loin. Sachez que je suis maintenant une vieille dame mais que j’ai été de tous les combats de ces 40 dernières années. 
Respectueusement. 
Marie-France Watremez

A propos du M.A.S.D.U ?

1er mars 2007 18:45, par Abbé Philippe Laguérie

Chère Madame Watremez,

Que vous l’appeliez M.A.S.D.U comme l’abbé de Nantes en son temps ou que vous dénonciez le funeste esprit du concile comme Mgr Lefebvre ou comme le Pape le 22 décembre 2005 devant la Curie, il y a bien eu un vaste mouvement de syncrétisme religieux qui a fait un tort considérable à l’Eglise et duquel Elle ne s’est pas encore relevée, même si la période actuelle est beaucoup moins provocatrice que celle des années 70. Les grandes thèses qui alimentent cette utopie se trouvent dans le Concile Vatican II et, en attendant la fameuse interprétation authentique du Saint Siège, continuent de ternir tous les horizons de l’Eglise Catholique.

Mentionnons quelques-unes de ces thèses :

a) L’unité spirituelle du genre humain. S’il ne s’agissait ici que de prendre en compte la communauté de nature spirituelle des individus composants l’humanité, ce serait simplement une banalité. Mais s’il s’agit bien d’une unité (caractère de ce qui est un) selon l’esprit, alors il faut nous dire en quoi elle consiste. Quel est cet esprit, qui en est le fondement ? En quoi, dans cet esprit, les hommes sont-ils unis et même un ? Une unité spirituelle peut-elle être considérée en dehors de la grâce ? Si c’est bien celle de la grâce, alors cet esprit serait-il Le Saint Esprit lui-même ? Mais alors il s’agirait de la communion catholique dont il est manifeste qu’elle ne rassemble pas tous les hommes, loin s’en faut. Enfin si cette unité spirituelle est simplement une puissance, les hommes étant tous appelés à la vie de la grâce dans l’Esprit de Dieu, alors pourquoi, en de nombreux passages la donner pour une réalité en acte, un fait et même un fait en marche inéluctable...

b) La médiation universelle de la conscience. Toute loi morale, toute vérité qui vient aux hommes doit évidemment passer par le jugement de la conscience de chaque homme.Nul n’en disconvient et surtout pas St Thomas d’Aquin. Mais ce n’est pas dire pour autant qu’à défaut d’un jugement correct l’homme ne serait plus soumis à la vérité ni à la morale. Et que les données externes de la Révélation et même du droit naturel perdraient auprès de lui leur caractère contraignant. Ces données externes s’imposent précisément à la conscience elle-même. Il y a là une conception tout à fait erronée de la conscience, celle-ci n’est pas une recomposition subjective du paysage intellectuel mais un jugement de l’intelligence qui se soumet au réel ontologique auquel appartiennent évidemment la vérité et la loi de Dieu. L’homme qui ne s’y soumet pas pèche contre sa conscience, tout simplement. C’est cette conception erronée de la conscience qui induit ce fameux droit à la liberté religieuse, fondée sur la structure métaphysique de l’homme (sa dignité) puisqu’aucune loi extérieure ne saurait lui être imposée du dehors, si ce n’est dans de justes limites (pourquoi?) du bien commun (?).

Il y a bien dans le Concile une dizaine de thèses semblables, fortes, cohérentes entre elles et ...explosives. Il était temps qu’un vrai débat revienne !