1 janvier 1970

25 mars 1963 [Mgr Lefebvre] Lettre aux spiritains sur la première session du concile Vatican II

SOURCE - Mgr Lefebvre - 25 mars 1963

Fondements de la liturgie
Le faisceau de toutes les prières qui ont leur origine dans l’Église, celles qui ont été par elle formulées, groupées, harmonisées autour d’actes prescrits forme cette admirable liturgie qui est l’expression de la foi, de l’espérance et de la charité de l’Église de la terre à l’égard de Dieu par le Christ Notre Seigneur. La pensée de cette liturgie est toute orientée d’abord vers Dieu qui entraîne l’Église dans la vie trinitaire. Le père se complaît dans son Église, car il y retrouve partout son Fils bien-aimé, qui n’a eu d’autre désir que d’embraser de son Esprit de Vérité et d’amour l’Église, ainsi vraiment assumée par la Vie trinitaire.

Mais de même que tout ce qui vient de la Trinité est fait pour en vivre et y retourner, ainsi l’Église, à l’image de la Trinité, et dans son esprit d’amour, entraîne toutes les âmes qui viennent à elle et qui entendent son appel à cette nouvelle vie divine en Jésus et par l’Esprit Saint. Elle les engendre, elle les nourrit, elle les transforme dans et par sa liturgie. On peut dire en Vérité que la liturgie est vraiment le sein de l’Église où les âmes trouvent la nourriture complète, l’aliment parfait de leur vie spirituelle, l’enseignement de la vérité, l’appréciation des vraies valeurs et leur hiérarchie, l’apprentissage de toutes les vertus. C’est dans l’ambiance de la liturgie que sont nées les écoles, les hôtels-Dieu, les hospices, la formation des clercs, l’apprentissage de la culture et des métiers, les sciences et les arts. In novitate spiritus.

L’histoire de la civilisation chrétienne trouve son fondement et son développement, sa vitalité dans la grande prière publique de l’Église qui infuse l’esprit de charité, l’esprit de justice à ceux qui en vivent. Toutes les initiatives charitables et saintes ont leur origine dans l’Esprit qui nous est donné par les sacrements et le sacrifice de l’autel.
Renouveau liturgique
C’est pourquoi nous devons nous réjouir profondément de constater chez nos contemporains un grand désir de vivre de la liturgie, une nouvelle estime de cette source incomparable de l’Esprit de Dieu. Le Concile se devait d’encourager ces saintes aspirations en les guidant et les orientant.

C’est l’Église tout entière qui ressent ce désir de remettre la liturgie à sa vraie place dans la vie chrétienne. Les papes les premiers ont été à l’origine de ce renouveau, ne faisant par ailleurs qu’exprimer ce que de nombreux évêques, prêtres et fidèles ressentent intimement. N’est-ce pas là d’ailleurs la manière d’agir profonde et suave du Saint-Esprit ?
Liturgie et apostolat
Mais la question de ce que l’on peut appeler la renaissance liturgique pose des problèmes fondamentaux pour l’Église tout entière. En effet, quel est le rôle de la liturgie dans l’apostolat de l’Église ? La réforme de l’ensemble liturgique édifié au cours des siècles doit-elle porter sur l’aspect du culte liturgique ou particulièrement sur la liturgie comme moyen d’apostolat ? Ne serait-ce pas en effet sous-estimer la liturgie que de la réduire à un moyen d’apostolat et de ne plus la considérer sous son aspect de culte public et de louange de Dieu ? La mésestime de la liturgie venait-elle surtout de la présentation liturgique des actes et des enseignements qui gardent en soi une valeur toujours aussi vivante ou au contraire a-t-elle son origine dans la diminution de l’esprit de foi et de l’esprit religieux chez les fidèles, et cela pour des motifs étrangers à la liturgie.

L’activité humaine est redevenue tellement étrangère à Dieu, tellement éloignée de son créateur, de son esprit vivificateur, que les âmes encore religieuses aspirent à renouer les liens brisés entre la prière et l’action.

Il serait trop simple et presque enfantin d’accuser la liturgie dans son mode d’expression et d’action actuel d’être à l’origine de la diminution de la foi chez les fidèles, et d’en être la cause unique ou du moins principale.

Le pape Pie XII disait aux curés et prédicateurs de carême : « Quand nous regardons l’humanité qui nous entoure et que nous nous demandons si elle est disposée et apte à recevoir en elle cette réalité de la vie surnaturelle, évidemment pour beaucoup la réponse ne peut être affirmative. Le monde surnaturel leur est devenu étranger, ne leur dit plus rien. C’est comme si les organes spirituels de la connaissance de vérités aussi hautes et salutaires étaient en eux atrophiés ou morts. On a prétendu expliquer un tel état d’âme par les défauts de la liturgie de l’Église ; on a cru qu’il suffirait de la purifier, de la réformer, de l’honorer pour voir ceux qui errent aujourd’hui retrouver le chemin des saints mystères. Qui raisonne ainsi montre qu’il a une conception très superficielle de cette anémie et de cette apathie spirituelle. Elle a des racines plus profondes » (Pie XII, 17 février 1948).

Disons donc sans hésitation que certaines réformes liturgiques étaient nécessaires et qu’il est souhaitable que le Concile continue dans cette voie, tout en y mettant ensuite une pause, car il est inconcevable que l’on change tous les dix ans de missels, de bréviaires, de rituels, etc., comme il est inconcevable que l’on modifie continuellement les textes et les traductions officielles.

Mais pour que ce renouveau liturgique soit pleinement efficace, il est peut-être plus nécessaire encore de renouer les liens de la prière liturgique, de la louange de Dieu, liens naturels et liens surnaturels, avec les activités quotidiennes. Ce fut et c’est encore le travail de l’Église missionnaire : Omnia instaurare in Christo. Omnia : c’est-à-dire surtout la famille, l’école, la commune, la profession, la cité. Il faut refaire ce travail avec l’aide des familles chrétiennes et avec le concours de tous les mouvements d’Action catholique et autres associations qui s’efforcent d’étendre le règne de Notre Seigneur.

Il est nécessaire pour bien situer la réforme liturgique de considérer d’une manière claire et évidente que la liturgie, qui est d’abord louange, est un culte public et véritablement une prière de la société, de la communauté prise sous tous ses aspects. Les grâces de la liturgie descendent sur le peuple chrétien et sur le monde pour le sanctifier dans toutes ses activités.

L’esprit du monde a refoulé à l’Église et enfermé dans les limites des lieux de culte la liturgie, la prière publique et les ministres de l’autel, envahissant des domaines qui étaient soumis à l’esprit chrétien, creusant ainsi un fossé entre la prière et l’action, entre l’Église et l’école, entre l’autel et la profession, entre l’eucharistie et la Cité : il a désintéressé les hommes de la prière, dont l’efficacité n’apparaît plus dans la vie.

N’est-ce pas un des motifs de la sclérose de la liturgie à l’intérieur même des Églises. La liturgie privée de son épanouissement normal dans toute la vie extérieure est devenue sous certains aspects inintelligible aux âmes simples pour lesquelles sont nécessaires les manifestations religieuses prolongeant le culte à l’extérieur de l’Église.

Mais laissons pour le moment ce dernier aspect qui fera certainement l’objet des préoccupations du Concile pour essayer de préciser comment peut se concevoir une nouvelle expression liturgique et quels sont les principes qui doivent nous guider en cette matière.
Principes directeurs d’une réforme liturgique 
1) Caractère humain de la liturgie
Reconnaissons en tout premier lieu que la liturgie a un double caractère qui la marque et la marquera toujours : un caractère profondément humain : Sciebat qui esset in homine (Jn 2,25) La psychologie de Notre Seigneur marque la liturgie, il connaît les besoins profonds des hommes, de leurs pauvres âmes marquées par le péché, mais aussi âmes d’enfants vis-à-vis de leur Père céleste, âmes sensibles à la Passion du Fils de Dieu, âmes confiantes envers ce que représente pour eux leur mère l’Église, âmes plus sensibles aux exemples qu’aux paroles, plus remuées par le chant que par la lecture, plus touchées par une parole vivante que par une récitation, âmes soucieuses d’un pardon visible, âmes plus facilement éduquées par les yeux que par les oreilles.

Il sait, notre Maître, que tout cela nous est nécessaire, du moins utile à notre sanctification, à l’élévation de nos âmes vers lui.
2) Caractère divin de la liturgie
À ce caractère humain de la liturgie doit s’ajouter encore plus réellement le caractère divin. Tout ce qu’il y a d’humain en elle est pour nous conduire à Dieu, par Notre Seigneur, dans l’esprit de lumière et de charité.

Nous sommes sur le seuil du mystère de la liturgie. Jusque-là, elle pouvait ressembler à toutes les initiations des rites païens. Nous entrons maintenant dans le domaine divin, dans lequel Dieu lui-même s’est chargé de nous guider.

Notre Seigneur a dit : Nemo venit ad Patrem nisi per me, personne ne va au Père sans passer par lui, par son sacrifice, par sa prière. Ainsi donc seule sa liturgie ouvre les mystérieux horizons célestes dans toute leur réalité, dans toute leur union avec les réalités terrestres.

Le ministre parfait de la liturgie est le pontife, celui qui établit le lien entre les réalités d’ici-bas et la vie éternelle.

Notre Seigneur était seul aussi à connaître son Père : Neque Patrem quis novit nisi Filius (Mt 11,27). Le ciel, c’est-à-dire le Père, reste pour nous le grand mystère, et la liturgie se doit de refléter ce mystère, dans ses silences ou dans certaines de ses cérémonies symboliques, dans certains de ses rites et dans toute son ambiance architecturale, musicale, ornementale et rituelle.

Il faut que tout y soit noble, grand, beau, ordonné, à l’image de Dieu lui-même présent dans le sanctuaire, car le temple n’est pas d’abord maison du peuple de Dieu, mais d’abord Domus Dei, où le peuple vint rencontrer, trouver Dieu et communier à lui.

Ce mystère s’exprime davantage dans certaines liturgies orientales où le prêtre semble s’isoler avec Dieu pour venir le porter plus parfaitement au peuple fidèle.

La liturgie doit donc toujours essentiellement garder ces deux caractères fondamentaux : être ce qu’elle est : divine et humaine, avec l’orientation de l’humain vers le divin qui est sa fin ultime. L’homme s’approchant de Dieu ne peut devenir que plus humain, retrouver la véritable image de Dieu selon laquelle il a été créé. Induite novum hominem qui secundum Deum creatus est in justitia et sanctitate veritatis (Ep 4,24). « Revêtez-vous de l’homme nouveau créé à l’image de Dieu dans la justice et la sainteté véritable. »

C’est en nous souvenant de ces principes fondamentaux, du mystère de Dieu et de la psychologie humaine, avec toutes les données de la théologie du péché et de la justification, de la rédemption par Notre Seigneur, son sacrifice et ses sacrements, avec les données de la vraie philosophie concernant l’éducation et l’enseignement de la vérité, embrassent toutes les facultés du corps et de l’esprit, que nous pourrons donner aux adaptations liturgiques leur juste place et leur véritable opportunité.

Efforçons-nous donc de circonscrire et de définir de plus près le problème qui a tant préoccupé les pères conciliaires.
Élément humain important : intelligence des textes
Pour participer réellement à ces mystères de la liturgie, l’âme fidèle éprouve le besoin de comprendre toujours mieux et plus profondément les textes liturgiques, et de s’associer intimement à l’action qui s’opère sous ses yeux.


Elle recherche sa nourriture spirituelle dans ces admirables textes chargés de vérité et de vie ; il apparaît donc indispensable de lui en donner l’intelligence, qu’il s’agisse de textes lus ou chantés.
Langue liturgique : doit-elle être universelle ou vernaculaire ?
Il conviendra donc de faciliter cette compréhension. De là à conclure qu’il faut proscrire une langue incompréhensible, le pas est vite franchi. Cependant d’autres considérations nous invitent à réfléchir avant de procéder à des mesures aussi radicales.
1) Avantages de la langue universelle.
En effet, il convient donc de nous rappeler que nous participons à une action d’Église, d’Église catholique, à une prière qui nous enseigne notre foi, notre foi catholique. Ainsi la liturgie, dans la mesure où elle garde son caractère universel nous forme à une communion catholique et universelle. Dans la mesure où la liturgie se localise, s’individualise, elle perd cette dimension universelle et catholique qui marque profondément les âmes.

Il semble opportun de citer deux faits d’expérience.

Il est indéniable que les actions liturgiques et l’action par excellence : la sainte messe, exprimées entièrement en langue vernaculaire, comme c’est le cas dans les rites orientaux, circonscrivent la communauté chrétienne, lui imposant des limites. Elles nécessitent pour les communautés en diaspora la présence de prêtres du pays pour participer au rite liturgique. Les communautés s’isolent et les membres souffrent de cet isolement. Et il n’apparaît pas d’une manière évidente que ces communautés soient plus ferventes et plus pratiquantes que celles qui usent d’un langage universel, incompris de beaucoup, mais susceptible de traduction à la portée de tous.

Un deuxième fait est celui qui se manifeste dans les nouvelles chrétientés qui argumentent de cette universalité de la liturgie catholique pour prouver la vérité de l’Église catholique, contre la multiplicité des rites protestants. C’est d’ailleurs une des principales raisons de la cohésion de l’islam qui considère l’arabe comme la langue unique du Coran, et va jusqu’à en interdire la traduction.

C’est une première considération qui prête à la réflexion. Nous faisions allusion à l’expression de la foi universelle catholique, par une langue universelle. On ne peut nier que la foi est en fonction de la rédaction de la prière liturgique : Lex orandi, lex credendi. La langue unique protège l’expression de la foi, contre les adaptations linguistiques au cours des siècles et, conséquemment, la foi elle-même. Les langues vivantes sont changeantes et mouvantes. Et si l’on n’adapte pas l’expression liturgique à la langue de l’époque moderne, on en arrive peu à peu à s’exprimer également dans une langue incomprise, comme c’est le cas de la langue employée dans le rite éthiopien ; le ghèze qui était la langue vernaculaire ancienne n’est plus ni parlé ni compris aujourd’hui.
2) Fin ultime de la liturgie : l’union à Dieu.
Autre considération qui a sa valeur : l’intelligence des textes n’est pas la fin ultime de la prière, ni le seul moyen de mettre l’âme en prière, c’est-à-dire dans l’union à Dieu, qui est le but de la prière.

L’objet propre de la prière est Dieu. L’âme qui atteint Dieu et s’unit spirituellement à lui est en prière et s’abreuve à la source de vie.

Il serait donc contraire à la fin même de l’action liturgique de tendre à une attention à l’intelligence des textes telle qu’elle fasse obstacle à l’union à Dieu.

D’autre part l’âme simple, peu cultivée, vraiment chrétienne trouvera son union à Dieu tantôt par un chant religieux et céleste, tantôt par l’ambiance générale de l’action liturgique, la piété et le recueillement du lieu, sa beauté architecturale, la ferveur de la communauté chrétienne, la noblesse et la piété du célébrant, la décoration symbolique, l’odeur de l’encens, etc.

Peu importe le marchepied, pourvu que l’âme s’élève en Dieu et y trouve son aliment surnaturel par la grâce de Notre Seigneur.

Toutes ces considérations ne diminuent en rien la nécessité de rechercher une meilleure compréhension des textes liturgiques et une plus parfaite participation à l’action liturgique. Mais elles atténuent ce désir spontané et imprudent de ne vouloir qu’un seul moyen pour y parvenir, qui serait l’emploi pur et simple de la langue vernaculaire et la suppression de la langue universelle de l’Église dans toute la messe.
Conclusion sur la liturgie
Quelles seront en définitive les décisions du Concile ? Il est encore un peu tôt pour le dire.

Peut-être y aura-t-il une adaptation dans le sens de la langue vernaculaire pour la première partie de la messe, mais le Concile insistera vivement sur la préparation des fidèles et leur instruction liturgique par les exhortations et prédications des pasteurs et des catéchistes, sur une recherche constante de l’adaptation des missels mis à leur disposition pour faciliter cette meilleure intelligence de la liturgie et une active participation spirituelle et surnaturelle à l’action liturgique. Et dominant les réformes de détail, l’Église appellera tous ses enfants et ceux qui ne le sont pas encore à s’approcher des mystères divins pour approcher du mystère de Dieu, à s’unir au corps et au sang de la divine victime pour vivre de la vie trinitaire et augmenter ainsi la vitalité du corps mystique de Notre Seigneur, la sainte Église de Dieu.

Car tout est moyen par rapport à ce but essentiel qui est de sauver les âmes en leur rendant leur filiation divine. Ces quelques réflexions évoquent les soucis qu’eurent les pères du Concile à propos de la liturgie et leur désir de lui rendre sa véritable place dans la vie chrétienne.
Autres sujets abordés par le Concile
D’autres sujets ont été abordés tels que les sources de la révélation, l’oecuménisme, les schémas dogmatiques en général proposés en deux groupes de schémas : le premier abordant des sujets divers de la théologie dogmatique et morale, le second traitant spécialement de l’Église.

Il nous est impossible de décrire dans le détail les discussions qui eurent lieu à propos de ces schémas, non seulement à cause du secret des délibérations, mais nous devrions y employer de nombreuses pages.

Il me semble toutefois pouvoir dire qu’on a pu distinguer trois groupes d’interventions en général.
Aspect oecuménique
Les unes avaient pour principal objet l’aspect oecuménique du Concile et de ce fait tendaient à omettre tout ce qui dans les textes présentés risquait d’aviver les séparations au lieu de tendre à l’unité.

Ce souci est certainement pour une bonne part à l’origine de la discussion au sujet des deux sources de la révélation ; à l’origine aussi des modifications demandées au sujet des schémas de l’oecuménisme.

Ajoutons aussi que ceux qui étaient spécialement préoccupés de cet aspect du Concile tendent à insister sur la collégialité épiscopale de l’Église, s’efforçant de prouver la juridiction universelle habituelle du collège épiscopal uni au pape, même dispersé à travers le monde, souhaitent la constitution d’une représentation épiscopale doublant la Curie romaine, aspirent à doter de pouvoirs de magistère et de juridiction les Assemblées épiscopales nationales.

Tout ceci tendrait à faciliter l’union avec les Églises dissidentes.
Aspect pastoral
Un autre groupe est particulièrement soucieux d’orienter le travail du Concile vers la pastorale, c’est-à-dire d’une part, que les Actes conciliaires s’adressent directement au monde et aux fidèles et d’autre part qu’il étudie de près les adaptations possibles de la liturgie, des sacrements, de la discipline ecclésiastique, du droit canon, aux nécessités de l’apostolat d’aujourd’hui.

D’où la tendance de ceux-ci à ne pas rechercher les expressions dogmatiques, ni les précisions scolastiques relatives aux définitions théologiques. Le concile de Vatican II doit donner naissance à une nouvelle expression conciliaire. Le monde d’aujourd’hui attend cela du Concile.

En ceci ils rejoignent le premier groupe opposé aux schémas dogmatiques présentés traditionnellement, mais le motif est différent.
Aspect doctrinal
Enfin un troisième groupe estime qu’un Concile ne se conçoit pas sans exprimer des précisions dogmatiques contre les erreurs modernes qui tendent à déformer le dogme ou même à le nier. D’où la nécessité de réaffirmer des vérités traditionnelles de telle manière que ces erreurs soient formellement éliminées. Pour ces pères, c’est le premier but du Concile qui leur apparaît comme un but pastoral aussi, car c’est être bon pasteur que de protéger son troupeau contre les loups.

Ils affirment que les erreurs apparaissent nombreuses de notre temps et se publient même dans les milieux d’Église : qu’il s’agisse de l’Écriture Sainte, du péché originel, de la morale, des fins dernières pour ce qui est du dogme; qu’il s’agisse de vérités philosophiques, des preuves de l’existence de Dieu, de la connaissance de la vérité, de la métaphysique, de la cosmologie, de la distinction de la nature et de la grâce ; tout est remis en question. Il leur apparaît donc indispensable que le Concile indique clairement les sources de la vérité et réaffirme certains dogmes de manière explicite.

Ceux-là sont d’abord préoccupés de faire apparaître la foi dans toute sa pureté et son intégrité. Ils ne pensent pas que l’omission soit un encouragement à l’oecuménisme, mais au contraire que la vérité porte en elle la grâce de faire l’unité.

Ils craignent également que l’aspect purement pastoral du Concile l’entraîne dans des discussions sans fin et préfèrent laisser le soin des adaptations à des commissions post-conciliaires.

Ils ne souhaitent pas non plus une décentralisation abusive et répugnent à une multiplication d’assemblées nanties de pouvoirs importants, introduisant dans l’Église une démocratisation contraire à toute sa tradition.

Ces craintes ne suppriment pas le désir de certaines réformes de la Curie romaine, des Assemblées épiscopales, de la liturgie, etc., mais avec une grande prudence, et une tendance très nette à laisser ce soin au souverain pontife lui-même.

Ces trois groupes ont exposé leur manière de penser en toute franchise et liberté.

Pourquoi ne pas dire qu’il apparaît évident que le Saint-Père désire obtenir ces trois objectifs. Les documents importants communiqués aux pères conciliaires à l’occasion de l’ouverture et de la clôture de la première session le manifestent.

Doctrine, pastorale, oecuménisme, tel est le triptyque soumis aux yeux des pères du Concile.

Et c’est parce que la poursuite de ces objectifs dans une seule et même expression a provoqué des divergences sérieuses qu’humblement je me suis permis de proposer la solution d’une double expression : doctrinale d’une part, exigeant des termes scientifiques, scolastiques, précis pour éliminer les ambiguïtés et les erreurs ; pastorale et oecuménique d’autre part, avec une présentation comprise de ceux auxquels elle s’adresse, sous forme d’exhortation et de directoire.

Le concile de Trente nous a donné un exemple de cette double expression dans ses définitions et exposés dogmatiques et dans son catéchisme pastoral.

N’est-ce pas un fait d’expérience que ce dilemme se pose continuellement aux pasteurs chargés d’enseigner le catéchisme et surtout à ceux qui les rédigent. Il est très difficile de garder au catéchisme toute sa richesse doctrinale et sa précision si l’on veut l’adapter dans son expression à la mentalité et la psychologie des enfants et des catéchumènes ; d’où la nécessité des explications de l’enseignement donné par les catéchistes.

La deuxième session nous éclairera sur tous ces problèmes passionnément intéressants et qui ont eu un écho extraordinaire dans le monde entier.

Le Saint-Père veille à l’élaboration de nouveaux schémas par les commissions conciliaires.

Tandis que les membres des commissions travaillent, l’heure est pour nous à la prière, comme les apôtres au Cénacle dans l’attente de la venue de l’Esprit Saint. La Vierge Marie était là et fut certainement toutepuissante sur le Coeur de Jésus pour qu’il envoie son Esprit. Ne cessons de la prier afin qu’elle intercède auprès de son divin Fils pour qu’Il daigne envoyer l’Esprit Saint illuminer les intelligences et les coeurs des successeurs des Apôtres en une nouvelle Pentecôte.