16 juillet 2014

[Avec l'Immaculée] Quelle est la position de Mgr Lefebvre au sujet des rapports avec Rome, à partir de juin 1988 ?

SOURCE - Avec l'Immaculée - 16 juillet 2014

Voici quelques citations de la lettre 70 des Dominicains d’Avrillé de juin-juillet 2014. Elles sont d’actualité, pour notre article :

« Si nous aimons la vérité et voulons la défendre, il faut nous ranger résolument dans le camp de la vérité dont Notre-Seigneur Jésus-Christ est Roi. »
On peut aussi lire une citation d’Ernest Hello : « Quiconque aime la vérité déteste l’erreur. (…) Cette détestation de l’erreur est la pierre de touche à laquelle se reconnaît l’amour de la vérité. Si vous n’aimez pas la vérité, vous pouvez jusqu’à un certain point dire que vous l’aimez et même le faire croire : mais soyez sûr qu’en ce cas vous manquerez d’horreur pour ce qui est faux, et à ce signe on reconnaîtra que vous n’aimez pas la vérité. »

Nous avons réfléchi plusieurs mois pour savoir si nous devions faire cet article ou non. A présent, il nous semble que c’est devenu indispensable et que c’est la volonté de Dieu. Sa lecture va être très pénible à certains, en particulier aux prêtres de la Résistance interne et externe car elle bouscule des idées communément admises. Nous proposons de commencer par une prière avant de continuer : récitons un Souvenez-vous. Nous demandons aux parrains et marraines en particulier, de prier pour les prêtres.
La quasi-totalité de la Résistance croit de bonne foi que Mgr Lefebvre ne voulait plus faire d’accord pratique avec Rome après les sacres de 1988. Nous allons voir dans cet article qu’il n’en avait pas répudié le principe (I). Nous revérifierons ensuite que nous avons bien raison pour notre part de refuser un accord pratique avec les hérétiques qui occupent Rome (II). Puis nous tenterons de définir quelle attitude nous devons avoir vis-à-vis de Mgr Lefebvre (III). Nous conclurons enfin en établissant les fondations que nous devons donner à notre combat anti-ralliement : la fidélité à Jésus-Christ et à la doctrine de l’Eglise (IV).
  I – Après mai 1988, Mgr Lefebvre n’a pas répudié le principe d’un accord pratique avec Rome.
Posons tout d’abord un premier principe qui va guider notre lecture : ce qui compte avant tout, c’est de suivre Notre-Seigneur. Il a dit : « Je suis la Voie, la Vérité et la Vie. » Nous ne devons donc suivre les hommes que dans la mesure où ils vont dans le même sens que Notre-Seigneur. S’ils ne vont pas dans le même sens, alors nous devons revenir vers notre unique Dieu et Sauveur.

Nous prévenons notre lecteur que nous allons dans cet article contredire un certain nombre de nos articles précédents. En effet, au début de notre combat contre le ralliement de la FSSPX, nous étions persuadés, suite à la lecture de certains articles, que Mgr Lefebvre après 1988 avait été clair sur les principes. Malheureusement, nous nous sommes aperçus que ce n’était pas le cas. Mgr Lefebvre a laissé entendre à plusieurs reprises, après sa décision de sacrer, en juin 88, et après les sacres, qu’il n’était pas contre le principe de l’accord pratique en lui-même, à condition que certaines garanties soient respectées, garanties qui, selon lui, étaient suffisantes pour protéger la Tradition. Il n’avait pas bien présent à l’esprit le principe qu’on ne pouvait pas se mettre sous l’autorité des hérétiques. Il l’a pourtant dit à plusieurs reprises, il est vrai, mais il l’a dit parce que c’était pour lui la conclusion inévitable de l’observation qu’il avait faite de la malhonnêteté romaine. Ce n’était pas, chez lui, un principe intangible qui viendrait de la doctrine de l’Eglise et qui l’obligerait en conscience. Nous allons illustrer cela par des citations :

Conférence à Ecône, Colloques avec Rome, 125-B, le 9 juin 1988 :

« J’ai signé le protocole le 5 mai, un peu du bout des doigts, il faut bien le dire, mais quand même… Bon, en soi, c’est acceptable, sans quoi je ne l’aurais même pas signé, bien sûr… Mais à la réflexion […] nous nous apercevons clairement de leurs intentions. Et leurs intentions ne sont pas bonnes avec nous. Ils restent ce qu’ils sont, ils restent modernistes, ils restent attachés au Concile… »

Commentaire :
Donc même après avoir pris la décision de sacrer, Mgr Lefebvre pense encore que son Protocole du 5 mai 1988 est acceptable

La raison pour laquelle il n’a pas signé est donc non pas une raison de principes, mais un manque de confiance : nous nous apercevons clairement de leurs intentions, dit-il.

Ce n’est qu’ensuite, parce qu’il ne peut pas faire autrement, qu’il en conclut que Rome doit se convertir, car il pense qu’il est probable qu’il ne pourra jamais faire confiance à ces gens-là tant qu’ils ne seront pas convertis. Ce n’est donc pas par principe qu’il dit cela, mais forcé en quelque sorte par les faits, parce qu’il constate leur malhonnêteté.

L’extrait ci-dessous de la lettre du 2 juin 1988 est révélateur. On voit bien le processus de réflexion de Monseigneur Lefebvre :
[Conditions auxquelles Mgr Lefebvre accepte un accord pratique :]
« […] C’est pourquoi nous demandons plusieurs évêques, choisis dans la Tradition, et la majorité des membres dans la Commission Romaine, afin de nous protéger de toute compromission.

[ le manque de confiance exposé ci-dessous est la cause de la décision qui va être annoncée juste après :]
Étant donné le refus de considérer nos requêtes, et étant évident que le but de cette réconciliation n’est pas du tout le même pour le Saint-Siège que pour nous, nous croyons préférable d’attendre des temps plus propices au retour de Rome à la Tradition.
C’est pourquoi nous nous donnerons nous-mêmes les moyens de poursuivre l’œuvre que la Providence nous a confiée (…)

[ Conclusion : la conversion de Rome est attendue :]
Nous continuerons de prier pour que la Rome moderne, infestée de modernisme, redevienne la Rome catholique et retrouve sa Tradition bimillénaire. Alors le problème de la réconciliation n’aura plus de raison d’être et l’Église retrouvera une nouvelle jeunesse. »

Nous allons retrouver à plusieurs reprises, jusqu’à la mort de Mgr Lefebvre, le 25 mars 1991, le même schéma de réflexion :
1. accord pratique recherché
2. mais manque de confiance car ils ne tiennent pas leurs promesses
3. donc on doit attendre la conversion des modernistes car ils mentent trop (et non pas parce que l’on ne peut en conscience se remettre sous leur autorité).

L’autorité moderniste aurait été acceptée par Mgr Lefebvre s’il y avait eu les garanties de commission romaine et d’évêques qu’il réclamait. Il le laisse entendre clairement à plusieurs reprises. Cependant, il est possible de trouver beaucoup de citations donnant l’impression du contraire. Mgr Lefebvre s’est beaucoup contredit… comme nous-mêmes, d’ailleurs, nous nous contredisons par rapport à ce que nous avons écrit précédemment. Nous n’en voulons pas à Mgr Lefebvre. Il nous a ouvert la voie et c’était une voie difficile, jamais encore parcourue dans l’histoire de l’Eglise. Nous avons à présent le recul, depuis 1988... Mgr Lefebvre, lui, était en plein dans la tourmente et environné d’avis contradictoires, dans une situation exceptionnellement grave et nouvelle.

Nous retrouvons le même schéma de réflexion en trois temps (recherche d’accord – manque de confiance – conclusion qu’une conversion nécessaire pour qu’ils soient fiables) :

- à Flavigny, en décembre 1988 (Fideliter 68),
- dans l’interview un an après les sacres de juillet 1989 (Fideliter 70),
- dans la conférence du 6 septembre 1990 (Fideliter 87)
- et en partie dans le Fideliter 79 de janvier 1991. Cette interview faite par André Cagnon à l’occasion des 20 ans de la Fraternité Saint Pie X a dû avoir lieu probablement autour d’octobre 1990. Elle est cependant bien meilleure que les autres interviews et elle comporte un paragraphe qui est précieux pour nous, encore maintenant. Nous le donnons tout de suite sans le commenter, pour réconforter notre lecteur, puis nous reviendrons dessus plus loin :

« FIDELITER - Qu'est-ce que vous pouvez dire à ceux d'entre les fidèles qui espèrent toujours en la possibilité d'un arrangement avec Rome ?
Monseigneur - Nos vrais fidèles, ceux qui ont compris le problème et qui nous ont justement aidés à poursuivre la ligne droite et ferme de la Tradition et de la foi, craignaient les démarches que j'ai faites à Rome. Ils m'ont dit que c'était dangereux et que je perdais mon temps. Oui, bien sûr, j'ai espéré jusqu'à la dernière minute qu'à Rome on témoignerait d'un petit peu de loyauté. On ne peut pas me reprocher de ne pas avoir fait le maximum. Aussi maintenant, à ceux qui viennent me dire : il faut vous entendre avec Rome, je crois pouvoir dire que je suis allé plus loin même que je n'aurais dû aller. »

Étudions à présent la conférence donnée à Flavigny en décembre 1988 :

On y trouve toujours le schéma énoncé ci-dessus :

1. L’accord pratique avec Rome est considéré favorablement si les conditions sont respectées :

« J'aurais bien signé un accord définitif après avoir signé le protocole, si nous avions eu la possibilité de nous protéger efficacement contre le modernisme de Rome et des évêques. Il était indispensable que cette protection existe. (…) Que fallait-il pour être protégés de Rome et des évêques ? Moi, je voulais une commission à Rome qui soit composée entièrement de traditionalistes (…). Cette commission devait comprendre sept membres. Moi, je demandais que les sept membres soient de la Tradition. Ils n'ont pas voulu. Ils ont dit : « Deux seulement, cinq pour nous, dont la présidence et la vice-présidence et deux pour vous. Ensuite, j'ai demandé trois évêques pour que soient assurées les ordinations et les confirmations. Ils ont dit : non, un seul. »

2. Mgr Lefebvre n’a pas confiance :

« Au cours des derniers contacts que j'ai eu à Rome, j'ai plusieurs fois voulu sonder leurs intentions, mesurer s'il y avait un véritable changement. (…) En discutant avec Rome, j'ai constaté qu'il n'en était rien.(…) Force m'a bien été de constater qu'aucun accord ne pouvait être réalisé qui nous donne à la fois toute garantie et la conviction que Rome voulait sincèrement concourir à la préservation de la Tradition. »

3. Donc, dans la même conférence, parce qu’il n’est pas possible de faire autrement, Mgr Lefebvre dit attendre la conversion des modernistes :

« Aussi quand on nous pose la question de savoir quand il y aura un accord avec Rome, ma réponse est simple : quand Rome recouronnera Notre Seigneur Jésus-Christ. Nous ne pouvons être d'accord avec ceux qui découronnent Notre Seigneur.»

Commentaire sur la conférence de Flavigny :

En décembre 1988, Mgr Lefebvre n’a donc toujours pas condamné son protocole doctrinal du 5 mai 1988 acceptant de ne faire aucune polémique sur Vatican II (point 3), acceptant le nouveau code de droit canon. Par ailleurs, Mgr Lefebvre avait accepté qu’il y ait régulièrement une messe novus ordo à Saint Nicolas du Chardonnet : cf. communiqué de Mgr Lefebvre sur l’arrêt des colloques du 19 juin 1988 :
« […] La question de l’évêque est solutionnée avec peine : on insistait pour nous montrer que nous n’en avions pas besoin. Le cardinal nous fait savoir qu’il faudrait laisser alors célébrer une Messe nouvelle à Saint-Nicolas-du-Chardonnet. Il insiste sur l’unique Église, celle de Vatican II. Malgré ces déceptions, je signe le protocole le 5 mai. Mais déjà la date de la consécration épiscopale fait problème.[…] »

En décembre 1988, Mgr Lefebvre dit donc que si Rome lui faisait une proposition avec une commission et des évêques selon ses souhaits, il signerait tout de suite : J'aurais bien signé un accord définitif après avoir signé le protocole, si nous avions eu la possibilité de nous protéger efficacement contre le modernisme de Rome et des évêques. Il était indispensable que cette protection existe.

Le problème qui se pose à nous, de la Résistance, c’est que ce protocole que Mgr Lefebvre était encore prêt à signer en décembre 1988, est très mauvais et vraiment inacceptable en conscience. En effet, comme dit le pape Saint Felix dans Inimica vis : « c'est approuver l'erreur que de ne pas y résister ; c'est étouffer la vérité que de ne pas la défendre... Quiconque cesse de s'opposer à un forfait manifeste peut en être regardé comme le complice secret. » Or, Mgr Lefebvre, lui, dans son protocole avait mis en point n°3 : À propos de certains points enseignés par le Concile Vatican II ou concernant les réformes postérieures de la liturgie et du droit, et qui nous paraissent difficilement conciliables avec la Tradition, nous nous engageons à avoir une attitude positive d’étude et de communication avec le Siège Apostolique, en évitant toute polémique.

Ce point 3 est donc une compromission grave. Cela revient à accepter le Concile en entier, puisqu’il faut l’étudier positivement sans polémiquer dessus. Objectivement, on ne peut donc signer ce protocole sans faire un péché grave contre la foi. On s’aperçoit ici que Mgr Lefebvre ne s’en aperçoit pas. Il pense que ce texte est acceptable. Nous ne jugeons pas celui qui a sauvé le sacerdoce catholique. Mgr Lefebvre était bien intentionné et il n’avait pas le recul que le temps nous donne à présent. Mais nous sommes obligés en conscience de constater qu’il n’avait pas les idées claires sur les principes, encore en décembre 1988.

Le point 5 du Protocole de 1988 est également inacceptable : 5. Enfin, nous promettons de respecter la discipline commune de l’Église et les lois ecclésiastiques, spécialement celles contenues dans le Code de Droit Canonique promulgué par le Pape Jean-Paul II, restant sauve la discipline spéciale concédée à la Fraternité par une loi particulière.

En 1984, Mgr Lefebvre avait pourtant fait des conférences contre le nouveau code de droit canon de 1983, disant qu’il était pire que Vatican II. Il est évident que la discipline particulière donnée à la Fraternité ne le protégeait pas de devoir accepter des éléments inacceptables de ce code. Ce point 5 est donc également inacceptable en conscience. En fait, si aujourd’hui on proposait à la Résistance de signer un tel protocole, nous devrions préférer mourir martyrs que de le faire… Mais encore une fois, nous ne jugeons pas Mgr Lefebvre. Nous jugeons les faits objectifs dans le but de clarifier les bases sur lesquelles prêtres et fidèles de bonne volonté pourront s’appuyer afin de reconstruire une Résistance solide. Sur le point des relations avec Rome, Mgr Lefebvre était manifestement de bonne volonté mais aveuglé.

Nous allons voir que malheureusement, en juillet 1989, dans l’interview un an après les sacres du Fideliter 70, Mgr Lefebvre est encore dans le même état d’esprit.

De nouveau, on trouve le même schéma en trois étapes, dans cette interview de juillet 1989 : 1. un accord serait encore envisageable, 2. mais ils ne tiennent pas leur promesses donc on ne peut avoir confiance, 3. donc nous attendons leur conversion, non à cause de leurs hérésies mais à cause de leurs mensonges qui les rendent peu fiables.
Voyons à présent quelques citations :

Fideliter 70, juillet 1989 : « un an après les sacres ».

1. l’accord pratique est encore envisageable en principe :
Sur la porte latine, on peut lire dans le bulletin Notre-Dame d’Aquitaine n°9 de mars 2006 :

« J'ai voulu aller aussi loin que possible pour montrer la bonne volonté qui était la nôtre. On nous a alors remis la question du Concile sous les yeux, dont nous ne voulions pas entendre parler. On a trouvé une formule, acceptable à la rigueur.

Ensuite ils nous accordaient la messe et les sacrements et les livres liturgiques. Mais au sujet de cette commission romaine et du sacre des évêques ils n'ont pas voulu accepter nos demandes. Nous n'obtenions que deux membres sur sept dans la commission romaine, ni le président, ni le vice-président et je n'obtenais qu'un évêque, alors que j'en demandais trois. Cela était déjà, presque inacceptable. Et quand, avant même de signer, nous demandions quand aurions-nous cet évêque, c'était la fuite en avant. On ne savait pas. Mois de novembre, on ne sait pas. Noël, on ne sait pas. Impossible d'avoir une date.

C'est là, qu'après avoir signé le protocole qui devait ouvrir la voie à un accord, j'ai réfléchi. Cette accumulation de méfiance et de réticence, m'a poussé à exiger la nomination d'un évêque pour le 30 juin, parmi les trois dossiers que j'avais déposés le 5 mai. C'est cela, ou je fais des évêques. C'est cette mise en demeure qui a fait que le cardinal Ratzinger a dit : « Si c'est comme cela, le protocole est aboli. C'est fini il n'y a plus de protocole. Vous rompez les relations. » – C'est lui qui l'a dit, ce n'est pas moi.

Le 20 mai j'ai écrit au Saint Père en lui disant que j'avais signé le protocole, mais que je tenais absolument à avoir des évêques et pour le 30 juin. Mais en fait il n'y a pas eu moyen d'arriver à un accord. Tandis que je mettais le cardinal Ratzinger au pied du mur et qu'il nous disait qu'il allait nous donner un évêque le 15 août, il me demandait encore d'autres dossiers, pour que le Saint-Siège puisse choisir un évêque qui aurait « le profil » désiré par le Vatican. Où est-ce que cela pouvait nous mener ?

Constatant l'impossibilité de nous entendre, le 2 juin j'ai écrit de nouveau au Pape : inutile de continuer les colloques et les contacts. Nous n'avons pas le même but. Vous voulez nous rallier et nous réconcilier et nous, nous voulons être reconnus tels que nous sommes. Nous voulons continuer la Tradition, comme nous le faisons.»

Commentaire :

- On voit ici que pour Mgr Lefebvre, le texte du protocole de 1988 est « acceptable à la rigueur » (ce qui est faux) mais que par contre, il est « presque inacceptable » pour lui qu’on ne lui donne qu’un évêque au lieu de trois. Il est donc clair que la doctrine erronée du Protocole du 5 mai 1988 contrarie moins Mgr Lefebvre que le nombre d’évêques. Il raisonne donc, ici, en homme pratique et non en homme de doctrine. Mgr Lefebvre insiste aussi sur le fait que ce n’est pas lui qui a renoncé au Protocole, mais que c’est le Cardinal Ratzinger qui l’a retiré. Pourtant, il aurait dû y renoncer le premier, pour des raisons doctrinales… Ce n’est donc pas pour des raisons doctrinales que Mgr Lefebvre a renoncé au Protocole, mais parce qu’il n’obtenait pas l’évêque.

- A plusieurs reprises dans des conférences différentes, Mgr Lefebvre insiste sur le « profil » de l’évêque qui devait être dans l’esprit de Vatican II. Il dit le 6 septembre 1990 que c’est « le fond de la difficulté ». Il pense qu’un évêque vraiment traditionnel aurait assuré une garantie suffisante (aidé par la commission de deux membres sur sept). On comprend donc mieux l’attitude actuelle de Mgr Fellay et la troisième des six conditions (édictées en 2012) qui exige un évêque… Il est pourtant évident que c’est une erreur de croire qu’un évêque traditionnel avec deux membres ou même sept membres dans une commission peut faire le poids face au rouleau compresseur maçonnique romain. Sans compter que l’on ne peut en conscience accepter de se soumettre à des autorités maçonniques et hérétiques.

- Il est aussi problématique qu’en 1989, Mgr Lefebvre présente de nouveau comme légitime cette idée de vouloir être « reconnus tels que nous sommes ». C’est une idée que nous combattons depuis le début du combat de la Résistance. Tous nos prêtres s’évertuent au contraire à répéter que nous ne pouvons en conscience réclamer d’être « reconnus tels que nous sommes » par des gens qui font des réunions dans l’esprit d’Assise : cela mettrait l’unique vraie doctrine catholique que nous défendons au même rang que les autres religions.

2. Mgr Lefebvre n’a pas confiance

« Mais rapidement, nous nous sommes aperçus que nous avions affaire à des gens qui ne sont pas honnêtes. (…) Je suis quand même allé à Rome pour ces colloques, mais en n'ayant pas confiance. » (Fideliter 70)

3. Conclusion traditionnelle disant d’attendre la conversion des autorités, mais fondée malheureusement sur la constatation de leur ruse et non de leur hérésie.

« C'est dans cette perspective qu'ils semblent donner toujours un peu plus et aller très loin. Il nous faut absolument convaincre les fidèles qu'il s'agit bien d'une manœuvre [constatation de leur ruse], que c'est un danger de se mettre entre les mains des évêques conciliaires et de la Rome moderniste. C'est le plus grand danger qui les menace. Si nous avons lutté pendant vingt ans pour éviter les erreurs conciliaires, ce n'est pas pour nous mettre maintenant dans les mains de ceux qui les professent. »

Mgr Lefebvre ne récuse pas l’idée d’accord pratique, malgré ces paroles. Dans la citation que nous allons donner ci-dessous, nous constatons qu’il continue d’affirmer cette volonté de dialogue avec les autorités romaines. Il souhaite même inciter Rome au dialogue, quand la situation se sera aggravée. Il souhaite que les autorités romaines se tournent vers la FSSPX, attirées par ses œuvres florissantes. Il pense donc qu’il est possible en soi de faire un accord avec les Romains, quand ils reconnaîtront sincèrement que la situation est grave, mais avant qu’ils ne soient vraiment convertis. Voici en effet ce qu’il affirme :

« Encore une fois, ce sont les faits qui parlent. Quand on ouvre un séminaire, que l'on crée des prieurés, que l'on ouvre des écoles, que les Sœurs essaiment et que les couvents se multiplient, cela constitue le seul moyen d'obliger Rome au dialogue. Il ne s'agit pas de ma présence, mais bien des œuvres. Ils se rendent bien compte que ce n'est pas rien. Les évêques s'énervent un peu que l'on s'installe ici ou là. Alors ils se plaignent à Rome et Rome sait.

Je ne crois donc pas qu'il soit opportun de tenter quelque chose en direction de Rome. Je pense qu'il faut attendre. Attendre malheureusement que la situation s'aggrave encore de leur côté. Mais jusqu'à présent ils ne veulent pas en convenir. » (Fideliter 70)

Mgr Lefebvre fait aussi une réflexion intéressante sur le texte du Protocole du 5 mai 1988 : nous avons étudié que dans cette interview de juillet 1989, Monseigneur considère qu’il est « acceptable à la rigueur ». Cependant, il dit plus bas, dans la même interview, en parlant du serment introduit en 1989 par le Cardinal Ratzinger :

« On peut se demander si l'on n'a pas voulu à Rome, corriger ainsi le texte du protocole. Bien qu'il ne nous satisfasse pas, il paraît encore trop en notre faveur en l'article 3 de la déclaration doctrinale, car il n'exprime pas assez la nécessité de nous soumettre au Concile. Alors je pense qu’ils se rattrapent maintenant. (…) A la différence du protocole, par ces nouveaux textes [c’est-à-dire le serment de 1989] on se soumet au Concile et à tous les évêques conciliaires. C'est leur esprit et on ne les changera pas. »

Commentaire :
Mgr Lefebvre, dans la même interview, dit au début que le texte du Protocole est « acceptable à la rigueur », puis il dit à la fin qu’il ne le satisfait pas. Il n’y a donc pas assez de précision dans les termes, pour qualifier ce document... Mais le plus intéressant, c’est de voir que Mgr Lefebvre n’avait pas conscience de se soumettre au concile en signant ce Protocole. Reprenons le texte du protocole : il est très ambigu. Nous sommes terriblement loin du oui, oui, non, non de Notre-Seigneur :

« 3. À propos de certains points enseignés par le Concile Vatican II ou concernant les réformes postérieures de la liturgie et du droit, et qui nous paraissent difficilement conciliables avec la Tradition, nous nous engageons à avoir une attitude positive d’étude et de communication avec le Siège Apostolique, en évitant toute polémique. »

Mgr Lefebvre considère en juillet 1989 qu’il n’accepte pas le Concile Vatican II en signant cela. Il se trompe. En effet, il utilise le verbe « paraître » et non le verbe « être ». Cela sous-entend qu’en fait, même si cela n’en a pas l’air, ces points litigieux du Concile sont conciliables avec la Tradition. Il dit que certains points du Concile lui « paraissent difficilement conciliables avec la Tradition ». « difficilement » est également un mauvais terme, rempli de compromission. Il aurait fallu utiliser la négation « ne…pas ». En effet, si quelque chose paraît difficilement conciliable, cela signifie non seulement que ce n’est qu’une apparence (cf. paraître), mais aussi, qu’avec de la bonne volonté et un peu de travail, on va pouvoir lever la difficulté (cf. difficilement).

De plus, Mgr Lefebvre s’engageait à ne pas faire de polémique. Cela sous-entendait donc que la foi n’était pas en danger. Ce qui est faux. Donc il est vraiment triste que Mgr Lefebvre, en 1989, n’ait toujours pas vu cela. Mais il devait le sentir au moins confusément, puisqu’il dit ici que le texte du Protocole ne le satisfaisait pas…

Cependant, il est très problématique que Mgr Lefebvre n’ait jamais condamné officiellement son Protocole et en parle encore, un an après les sacres, de cette façon. L’on comprend pourquoi, l’abcès n’ayant jamais été crevé, puisque le Protocole n’a jamais été vraiment condamné, Mgr Fellay a jugé bon de s’inspirer à ce point de ce mauvais texte pour rédiger sa Déclaration doctrinale du 15 avril 2012, (encore pire que celui-ci). Même si l’on aime et que l’on respecte Mgr Lefebvre, il faut donc que pour notre part, dans la Résistance, nous n’hésitions pas à condamner entièrement et avec énergie ce texte.

On constate aussi un autre problème dans cette interview : Mgr Lefebvre souhaite éviter l’esprit schismatique, ce qui est louable en soi, mais il est tellement scrupuleux sur ce point, qu’il va (sans s’en apercevoir) jusqu’à la compromission. Voici son état d’âme, en juillet 1989, très bien exprimé. Nous avons retrouvé la même idée dans d’autres conférences :

« J'aurais pu ordonner des évêques il y a trois ou quatre ans au moins. Cela aurait même été raisonnable. Mais, je crois que le Bon Dieu voulait que les choses mûrissent tout doucement, pour bien montrer à Rome que nous avons fait tout ce que nous avons pu pour arriver à obtenir cette autorisation d'avoir des évêques vraiment traditionnels. Tout en signant le protocole, Rome a refusé de nous donner ces évêques. Et si nous avions poursuivi, dans la pratique nous aurions eu toutes les peines du monde. Je pense bien qu'il fallait arriver à la décision que j'ai prise, et nous en étions à la toute dernière limite. »

Mgr Lefebvre a donc le souci de montrer qu’il a fait tout ce qu’il a pu pour éviter la rupture avec Rome. Il sous-entend ici de nouveau que c’était acceptable de signer le Protocole et d’accepter ce qu’il a accepté, c’est-à-dire non seulement le Protocole, mais aussi la nouvelle messe à Saint Nicolas qui faisait partie des conditions des tractations. Il ne considère pas cela un péché. Il dit que « c’était la toute dernière limite ». Cette appréciation ne va pas. C’était objectivement un péché de signer le Protocole et un autre péché d’accepter la nouvelle Messe à Saint Nicolas. Que Mgr Lefebvre n’en soit pas conscient, nous le comprenons, mais cela ne doit pas être une raison pour que nous occultions cette vérité. Si, dans la Résistance, nous présentions Mgr Lefebvre sans cesse de façon louangeuse et que nous n’osions jamais parler de cela, ce serait à notre tour de faire un péché. Nous ferions un mensonge réel et grave, par omission.

Nous devons donc convenir avec honnêteté que Mgr Lefebvre ne voulait pas faire d’accord avec Rome, non en raison des hérésies des autorités romaines, mais uniquement parce qu’elles n’étaient pas sincères et honnêtes. Si les hérétiques romains avaient été de « gentils » hérétiques sincères, Mgr Lefebvre aurait signé.

La Résistance a un esprit différent : nous affirmons pour notre part que nous ne devons pas nous remettre sous l’autorité des hérétiques, qu’ils soient gentils ou qu’ils soient méchants, qu’ils soient honnêtes ou qu’ils soient menteurs. Le plus grave n’est pas leur manque de qualités morales. Le plus grave est qu’ils ne professent plus la foi catholique.

En septembre 1990, nous allons encore une fois constater le même raisonnement en trois étapes, chez Monseigneur Lefebvre, avec cependant une petite amélioration.

Voici ce que dit Mgr Lefebvre dans sa conférence du 6 septembre 1990 :
« Humainement parlant, je ne vois pas de possibilité d’accord actuellement. On me disait hier : « Si Rome acceptait vos évêques et que vous soyez complètement exempt de la juridiction des évêques… » D’abord ils sont bien loin d’accepter une chose comme celle-là, ensuite il faudrait qu’ils nous en fassent l’offre, et je ne pense pas qu’ils y soient prêts, car le fond de la difficulté, c’est précisément de nous donner un évêque traditionaliste. Eux ils ne voulaient qu’un évêque ayant le profil du Saint-Siège. Le « profil », vous comprenez ce que cela veut dire. Ils savaient très bien qu’en nous donnant un évêque traditionnel ils constitueraient une citadelle traditionaliste. Ils ne le voulaient pas, et ne l’ont pas plus donné aux autres. Quand les autres disent qu’ils ont signé le même protocole que nous, ce n’est pas vrai. Notre protocole prévoyait un évêque et deux membres à la Commission romaine. Or eux ils n’ont ni l’évêque, ni les membres dans la Commission romaine. Rome a enlevé cela du protocole, car elle n’en voulait à aucun prix. »

Commentaire :
Dans cette citation, Mgr Lefebvre dit implicitement mais clairement que si on lui faisait l’offre d’un évêque traditionnel ayant le profil « traditionnel » et si on lui redonnait une commission de 7 membres avec 2 membres pour la Tradition, il reconsidérerait l’offre très attentivement et probablement, l’accepterait. De nouveau, on voit que, dans cette conférence qui a pourtant d’autres aspects très traditionnels, Mgr Lefebvre a une tournure de pensée qui n’est pas pleinement basée sur les principes. Pour lui, le fond de la difficulté est « précisément de [lui] donner un évêque traditionaliste ». Mgr Lefebvre se trompe, ici, en posant le problème. Le fond du problème n’est pas du tout d’avoir un évêque qui soit traditionaliste. Le vrai fond du problème, c’est que le pape ne professe plus la foi catholique et, qu’à ce titre, ce serait un péché de nous remettre sous son autorité. La réflexion de Mgr Lefebvre est d’ordre pratique, alors qu’elle aurait dû être doctrinale.

On voit ici que de nouveau, il défend encore le Protocole du 5 mai 1988 en présentant ses avantages par rapport au protocole de la Fraternité Saint-Pierre. Il ne le condamne toujours pas, sept mois avant sa mort.

Le problème est que chronologiquement, il semble que Mgr Lefebvre a prononcé ces paroles après avoir publié Itinéraire spirituel, si l’on en croit la date du 29 janvier 1990 qui figure au prologue d’Itinéraire spirituel. Il faudrait cependant que nos lecteurs qui possèdent une édition de 1990 d’Itinéraire spirituel regardent s’il n’y a pas une date plus précise de dépôt légal, par exemple. Nous ne savons pas sur combien de mois Mgr Lefebvre a rédigé son testament spirituel. Nous comptons sur nos lecteurs pour nous éclairer sur ce point. C’est important, pour mieux comprendre le fondateur de la Fraternité Saint Pie X. Voici les belles paroles claires qu’il a écrites dans Itinéraire spirituel, 1990, p.29 : «C’est donc un devoir strict pour tout prêtre voulant demeurer catholique de se séparer de cette Eglise conciliaire, tant qu’elle ne retrouvera pas la tradition du Magistère de l’Eglise et de la foi catholique.» Ces paroles devront être relativisées si elles sont antérieures à la conférence du 6 septembre1990, mais elles pourront être un signe de changement de l’état d’esprit de Mgr Lefebvre si elles ont été écrites après le 6 septembre 1990.

2. le manque de confiance

Il y a cependant une bonne évolution dans cette conférence, par rapport aux conférences et interviews précédentes : même si l’accord pratique est malheureusement toujours considéré comme possible par Mgr Lefebvre, le manque de confiance est basé cette fois-ci sur le manque de rectitude doctrinale de Rome et non sur les mensonges et la malhonnêteté des autorités romaines :

« Comment voulez-vous que l'on ait confiance en des gens comme cela, qui justifient la négation de Quanta Cura, de Pascendi, des décisions de la Commission biblique, etc... »

3. Bonne doctrine de cette conférence :

« Ou bien nous sommes les héritiers de l'Église catholique, c'est-à-dire de Quanta Cura, de Pascendi, avec tous les papes jusqu'avant le concile, et la grande majorité des évêques d'alors, pour le règne de Notre Seigneur et le salut des âmes, ou bien nous sommes les héritiers de ceux qui s'efforcent, même au prix d'une rupture avec l'Église et sa doctrine, d'admettre les principes des droits de l'homme, basés sur une véritable apostasie (…) »

Nous arrivons à présent à la dernière interview importante de Mgr Lefebvre avant sa mort. On observe une évolution positive très nette, même s’il l’on voit encore à quelques signes que Mgr Lefebvre n’a pas complètement répudié le principe de l’accord pratique.

Fideliter 79 de janvier 91 – interview faite à l’occasion des 20 ans de la Fraternité par André Cagnon :

On y trouve des affirmations contradictoires. Voici un bon principe :

« Enfin le Pape est plus œcuméniste que jamais. Toutes les idées fausses du Concile continuent de se développer, d'être réaffirmées avec toujours davantage de clarté. Ils se cachent de moins en moins. Il est donc absolument inconcevable que l'on puisse accepter de collaborer avec une hiérarchie semblable. (…) Il faudra encore attendre avant d'envisager une perspective d'accord. Pour ma part je crois que seul le Bon Dieu peut intervenir, car humainement on ne voit pas de possibilités pour Rome de redresser le courant. »

Voici malheureusement une réflexion sous-entendant que l’accord pratique n’est peut-être pas encore rejeté, dans l’esprit de Mgr Lefebvre :

« Pendant quinze ans on a dialogué pour essayer de remettre la Tradition en honneur, à la place qui lui est due dans l'Église. Nous nous sommes heurtés à un refus continuel. Ce que Rome accorde à présent en faveur de la tradition, n'est qu'un geste purement politique, diplomatique pour forcer les ralliements. Mais ce n'est pas une conviction dans les bienfaits de la Tradition. »

Cette dernière phrase est ambiguë. Cela semble sous-entendre que si la Rome moderniste devenait « sincèrement » convaincue des bienfaits de la Tradition (comme par exemple Benoît XVI a voulu le faire croire à Mgr Fellay en 2012), il faudrait accepter de collaborer avec elle, avant qu’elle ne soit convertie. En admettant même que cette conviction du Pape dans les bienfaits de la Tradition soit réellement sincère, celle-ci ne suffit pas : on ne se met pas sous l’autorité d’un supérieur s’il n’est pas pleinement catholique. Cette idée que l’on pouvait se mettre sous les ordres d’un pape pas pleinement converti avait été clairement sous-entendue par Mgr Lefebvre en juillet 1989 : « Je ne crois donc pas qu'il soit opportun de tenter quelque chose en direction de Rome. Je pense qu'il faut attendre. Attendre malheureusement que la situation s'aggrave encore de leur côté. Mais jusqu'à présent ils ne veulent pas en convenir. »

Etudions à présent la citation la plus connue de cette conférence. On y voit du mauvais et du bon mélangés. On constate que Mgr Lefebvre est en pleine évolution de pensée.

« FIDELITER - Qu'est-ce que vous pouvez dire à ceux d'entre les fidèles qui espèrent toujours en la possibilité d'un arrangement avec Rome ?

Monseigneur - Nos vrais fidèles, ceux qui ont compris le problème et qui nous ont justement aidés à poursuivre la ligne droite et ferme de la Tradition et de la foi, craignaient les démarches que j'ai faites à Rome. Ils m'ont dit que c'était dangereux et que je perdais mon temps. Oui, bien sûr, j'ai espéré jusqu'à la dernière minute qu'à Rome on témoignerait d'un petit peu de loyauté. On ne peut pas me reprocher de ne pas avoir fait le maximum. Aussi maintenant, à ceux qui viennent me dire : il faut vous entendre avec Rome, je crois pouvoir dire que je suis allé plus loin même que je n'aurais dû aller.

Commentaire :

Commençons par les aspects moins bons de cette citation : « Oui, bien sûr, j'ai espéré jusqu'à la dernière minute qu'à Rome on témoignerait d'un petit peu de loyauté. On ne peut pas me reprocher de ne pas avoir fait le maximum. » On constate malheureusement qu’en effet, Mgr Lefebvre sous-entend encore dans cette interview qu’un accord aurait été possible avec les autorités romaines si celles-ci avaient été loyales. De nouveau son scrupule d’avoir l’esprit schismatique réapparaît : on ne peut pas me reprocher de ne pas avoir fait le maximum.

Cependant, Dieu n’a pas permis que son fidèle serviteur meure sans avoir au moins sous-entendu que son Protocole du 5 mai 1988 était mauvais. Pour la première et dernière fois, il le critique à mots couverts: je crois pouvoir dire que je suis allé plus loin même que je n'aurais dû aller.

Cette critique, bien qu’insuffisante, est cependant très réconfortante. On sent que la lumière est en train de se faire. On constate ici également l’âme droite de Mgr Lefebvre. Cette phrase démontre sa bonne volonté et sa sincérité dans la recherche de la volonté de Dieu. Elle est même touchante.

Mgr Lefebvre et les fidèles : des relations d’estime mutuelle :

Mgr Lefebvre n’écrase pas de sa supériorité les fidèles, il ne les méprise pas. Il tient compte de leurs avis. On sent même qu’il les estime. Ce sont les fidèles qui l’ont mis en garde et qui ont osé parler. « Nos vrais fidèles, ceux qui ont compris le problème et qui nous ont justement aidés à poursuivre la ligne droite et ferme de la Tradition et de la foi, craignaient les démarches que j'ai faites à Rome. Ils m'ont dit que c'était dangereux et que je perdais mon temps. »

Mgr Lefebvre reconnaît à certains fidèles une vraie clairvoyance : ceux qui ont compris le problème. Il dit qu’il a été aidé par eux.

Nous, fidèles, devons tirer les leçons de cette réflexion de Mgr Lefebvre. Nous ne devons pas hésiter à dire respectueusement vérité à nos prêtres, si cela nous semble nécessaire. Si Mgr Lefebvre s’est dit aidé par les fidèles, cela signifie que nous pouvons aussi aider nos prêtres. Parfois, ce peut même être un devoir de parler, quoi qu’il en coûte. La vérité, à condition qu’elle soit dite respectueusement et dans la charité, passe avant le désir d’éviter les conflits.

Conclusion de cette première partie :
On constate que Mgr Lefebvre n’a donc jamais vraiment répudié un accord pratique avec Rome. Mgr Tissier de Mallerais, qui est la personne au monde qui connaisse le mieux Mgr Lefebvre l’a très bien vu. Voici ce que le Père Jean nous apprend, dans son sermon du 26 janvier 2014 : « Et puis assez récemment Mgr Tissier de Mallerais, dans une conférence qu'il a faite à Toulon en juin, voilà, il a dit, et il m'a confirmé par écrit, j'ai eu un échange de lettre avec lui, que Mgr Lefebvre a toujours cherché un accord pratique. Et je lui ai écrit en lui disant : avant les sacres c'est vrai, il y a eu des paroles, des citations de Mgr Lefebvre qui montrent que des fois il était moins ferme sur ce principe. Mais après les sacres, il a toujours été bien clair et je lui rappelle, à Mgr Tissier dans cette lettre, que dans le Fideliter 66, Mgr Lefebvre dit : «Je poserai mes conditions etc.» Réponse de Mgr Tissier de Mallerais, personnelle, j'ai la lettre datée du 11 septembre 2013 : « Il l'a dit, mais il ne l'aurait pas fait.»

Nous pensons, la lumière des citations ci-dessus, que Mgr Tissier de Mallerais a raison.

Immédiatement, plusieurs graves questions peuvent se poser à l’esprit de certains :

- Première question : « Mais alors, puisque la Résistance externe ne suit pas Mgr Lefebvre sur le point des relations avec Rome, peut-être avons-nous tort de poursuivre notre combat ? Peut-être nous trompons-nous depuis le début ? Beaucoup de prêtres sont sortis de la Fraternité pour être fidèles à l’esprit de Mgr Lefebvre. Or, ils se sont trompés sur son esprit... Peut-être devraient-ils et devrions-nous tous réintégrer la Fraternité Saint Pie X en demandant pardon ?

Nous allons répondre à cette question capitale en deuxième partie de cet article (II-A).

- Deuxième question : « Pourquoi dites-vous tout cela ? Cela va diviser la Résistance et déstabiliser tout le monde. Il valait mieux le cacher. Ce n’est pas prudent. »

Ce sera l’objet de la partie II-B.

- Troisième question : « Mais Mgr Lefebvre n’est-il pas un futur saint canonisable ? Ne devons-nous pas nous fier à son jugement plutôt qu’au nôtre ? »

Nous répondrons à cette question en troisième partie. (III-A)

- Quatrième question : « Comment devrons-nous à présent considérer Mgr Lefebvre en qui nous avons tant de dévotion ? »

Ce sera étudié en partie III-B.

- Cinquième question : « Jusqu’à présent, la plupart d’entre nous avait basé le combat anti-ralliement de la Résistance sur Mgr Lefebvre et la fidélité que nous croyons devoir lui devoir. Sur quoi allons-nous pouvoir baser notre combat à présent ? Qui sera notre modèle ? A qui nous référerons-nous ? »

Nous verrons la solution en partie IV.
II - Vérification du bien-fondé de notre position (II-A) et raisons pour lesquelles nous avons fait cet article (II-B)

II- A Vérification du bien-fondé de notre position :
Il y a un texte utile de Saint Jean de La Croix qui peut nous servir pour diriger notre jugement. Ce texte va nous montrer dans quelle direction nous devons aller pour trouver la solution. On peut le lire dans La montée du Carmel, livre II, chapitre 22 des Œuvres complètes aux éditions du Cerf. Et cela correspond au chapitre XX de ce site . Dans ce chapitre, Saint Jean de la Croix explique que nous ne devons pas chercher de révélation surnaturelle quand nous ne savons pas où est la volonté de Dieu. C’était possible sous l’Ancien testament, mais pas sous le Nouveau. Il dit que ce serait même un péché de le désirer. Il dit que la solution à toutes nos questions est dans la contemplation du Christ et de sa doctrine. Il fait parler ainsi Dieu le Père :

« Si je t'ai déjà tout dit dans ma parole, qui est mon Fils, je n'ai maintenant plus rien à te révéler ou à te répondre qui soit plus que lui. Fixe ton regard uniquement sur lui ; c'est en lui que j'ai tout déposé, paroles et révélations ; en lui tu trouveras même plus que tu ne demandes et que tu ne désires. Tu me demandes des paroles, des révélations ou des visions, en un mot des choses particulières ; mais si tu fixes les yeux sur lui, tu trouveras tout cela d'une façon complète, parce qu'il est toute ma parole, toute ma réponse, toute ma vision, toute ma révélation. Or, je te l'ai déjà dit, répondu, manifesté, révélé, quand je te l'ai donné pour frère, pour maître, pour compagnon, pour rançon, pour récompense. »

Nous allons donc essayer d’obéir de notre mieux à ce conseil et nous allons chercher dans la vie du Christ et dans la doctrine de l’Eglise, qui est la doctrine du Christ, la réponse à notre problème particulier et concret.

Nous allons diviser ce problème en plusieurs questions précises :

a. Avons-nous raison de condamner le texte du Protocole du 5 mai 1988 ou bien est-ce Mgr Lefebvre qui avait raison de le défendre ? Peut-on trouver dans l’Evangile des indications à ce sujet ?

Considérons le point 3 du Protocole de 88 : À propos de certains points enseignés par le Concile Vatican II ou concernant les réformes postérieures de la liturgie et du droit, et qui nous paraissent difficilement conciliables avec la Tradition, nous nous engageons à avoir une attitude positive d’étude et de communication avec le Siège Apostolique, en évitant toute polémique.

Question :
- Le concile Vatican II, notamment sur la liberté religieuse est-il oui ou non conforme à la doctrine de Jésus-Christ ?
La réponse est NON. Vatican II va contre la doctrine de Jésus-Christ. Il l’attaque.

Question suivante :
- Quand quelque chose met la foi en danger, dois-je m’engager à l’étudier de façon positive en évitant toute polémique ?
La réponse est NON, je dois m’élever vigoureusement contre. Jésus dit : Que votre oui soit oui, que votre non soit non, tout le reste vient du démon. Le silence vis-à-vis de l’erreur vient du démon.

Saint Thomas d’Aquin a dit, IIa IIae question 3 article 2 : « En cas de nécessité, là où la foi est en péril, n'importe qui est tenu de faire connaître sa foi, soit pour instruire ou affermir les autres fidèles, soit pour repousser les attaques des infidèles. »

L’absence de polémique promise par le Protocole vient donc du démon. Nous avons donc raison, rien que pour cet aspect (mais il y en a d’autres) de critiquer le Protocole de 1988 … ainsi que la déclaration du 15 avril 2012 de Mgr Fellay, qui est pire, d’ailleurs.

b. En admettant que Rome nous propose un accord sans la signature d’un Protocole, avons-nous raison de critiquer le principe même de l’accord pratique, pour la raison que l’on ne peut en conscience accepter de se mettre sous la coupe des autorités hérétiques ?

Que dit Jésus ?

1) Il dit, dans l’Evangile de Saint Matthieu (VI, 24) : « Nul ne peut servir deux maîtres. Car, ou il haïra l'un, et aimera l'autre; ou il s'attachera à l'un, et méprisera l'autre. […] »
Donc : nul ne peut se soumettre en même temps à Dieu et à un hérétique qui combat contre Dieu. En effet, si nous reconnaissons sur nous l’autorité d’un hérétique, en matière religieuse, par voie de conséquence, nous trahissons notre vrai maître qui est Notre-Seigneur.

2) Notre-Seigneur dit aussi dans l’Evangile de Saint Jean (XVIII, 37) : « Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. Quiconque est de la vérité écoute ma voix. »
Donc : nous ne pouvons nous remettre sous l’autorité de ceux qui contrefont la voix de la vérité et qui diffusent une fausse doctrine, tout en protestant de notre amour pour la vérité. On n’obéit pas à ceux qui crucifient Jésus. On ne peut pas à la fois reconnaître l’autorité de la voix de la vérité (Jésus) et reconnaître l’autorité de l’erreur (les modernistes qui occupent Rome).

3) Jésus dit encore dans l’Evangile de Saint Matthieu (VII, 15). « Gardez-vous des faux prophètes. Ils viennent à vous en vêtements de brebis, mais au dedans ce sont des loups ravisseurs.»
Donc : Si, pour obéir à Jésus, nous devons nous garder des faux prophètes, cela signifie que nous ne devons pas les accepter pour chefs. Nous ne devons pas établir une relation d’obéissance vis-à-vis d’un pasteur dont il faut se méfier. Les saints nous ont donné cet exemple :

4) Voici un exemple que nous avons trouvé dans l'oeuvre d'Arnaldo Xavier da Silveira, La nouvelle Messe de Paul VI, qu'en penser?, p.232 à 234 (document anglais sur ce lien. p. 151 et 152):
Saint Godefroy d'Amiens, saint Hugues de Grenoble, Guy de Vienne et d'autres évêques réunis au synode de Vienne (1112) résistèrent au Pape Pascal II, dans la question des investitures : "Si, comme nous ne le croyons absolument pas, vous choisissiez une autre voie et que vous refusiez de confirmer les décisions que nous avons prises, à Dieu ne plaise, nous serions alors éloignés de votre obéissance" (cité par Bouix, Tract. de Papa, t. II, p. 650). (Pour davantage de détails, cf. le nullam partem et l'apostolat 2ème partie)

Si donc des saints sont prêts à s’éloigner du Pape à cause d’un seul point de doctrine (ici, les investitures par le pouvoir temporel), a fortiori, nous devons nous éloigner des papes modernistes actuels qui s’éloignent de la doctrine du Christ non pas sur un point, mais sur d’innombrables points.

5) St Paul à Tite : Tite, III, 10 : "Évite un homme hérétique après une première et une seconde admonition, sachant qu'un tel homme est perverti et qu'il pèche puisqu'il est condamné par son propre jugement."
Donc : faire un accord avec les modernistes, c’est désobéir à Saint Paul qui demande d’éviter les hérétiques.

6) Le concile de Constantinople :
"Ignorent-ils donc que la sentence d’anathème n’est autre chose qu’une sentence de séparation ? On doit toujours éviter tout commerce avec ceux qui sont esclaves de crimes énormes, qu’ils soient du nombre des vivants ou parmi les morts, car on doit toujours se séparer de ce qui est coupable et nuisible. D’ailleurs nous avons d’Augustin, de pieuse mémoire, et qui jeta un si vif éclat parmi les évêques d’Afrique, plusieurs lettres où il enseigne qu’il faut anathématiser les hérétiques même après leur mort. Les autres évêques d’Afrique ont conservé cette tradition ecclésiastique, et la sainte Église romaine elle-même a anathématisé aussi quelques évêques après leur mort, quoique leur foi n’eût pas été incriminée pendant leur vie." (source Chaîne d'or de Saint Thomas sur Matthieu XVI 13-19)

Donc : nous devons éviter tout commerce avec les papes hérétiques actuels et nous devons nous séparer d’eux parce qu’ils sont coupables et nuisibles. Il est impossible de vouloir se mettre sous l’autorité d’hérétiques « nuisibles ». Ce serait un suicide et une désobéissance à la doctrine de l’Eglise.

Il y a d’autres arguments tirés de l’Ecriture Sainte et des Pères de l’Eglise, que l’on peut lire sur notre onglet « Fondements doctrinaux du nullam partem. »
II-B : Raisons pour lesquelles nous avons fait cet article :
« Pourquoi dites-vous tout cela ? Cela va diviser la Résistance et déstabiliser tout le monde. Il valait mieux le cacher. Ce n’est pas prudent. »

1) Faut-il cacher une vérité importante de laquelle dépend le fondement de notre combat, afin de ne pas diviser la Résistance ? Voici ce que dit Saint Thomas :

IIa-IIae question 37 article 1, sur la discorde :
"[...] 2. Une volonté qui adhère à Dieu est une règle juste, et il y a péché à se mettre en désaccord avec elle; de même, une volonté qui s'oppose à Dieu est une règle mauvaise, et il est bon de ne pas s'accorder avec elle. Provoquer une discorde qui supprime la bonne concorde réalisée par la charité est un péché grave; c'est pourquoi il est écrit dans les Proverbes (6, 16.19): " Il y a six choses que Dieu hait et une septième qu'il abomine ", et cette septième " c'est celui qui sème la discorde entre ses frères ". Mais causer la discorde pour supprimer une concorde mauvaise, fondée sur une volonté mauvaise, mérite l'éloge. C'est pourquoi S. Paul a eu raison de jeter la discorde entre ceux qui s'accordaient dans le mal. Le Seigneur a bien dit en parlant de lui-même (Mt 10, 34): " je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive. "

Commentaire :
Pour l’instant, de nombreuses personnes de la Résistance faisaient reposer une bonne partie de leur combat sur la fidélité à Mgr Lefebvre, qu’elles croyaient à tort anti-accordiste, après 1988. Leur combat reposait de bonne foi sur une fausse croyance. Même pour garder l’unité, nous ne pensons pas que Dieu serait satisfait que nous fassions reposer notre combat sur quelque chose d’erroné. Comment pourrions-nous dire à Jésus, qui est la Vérité incarnée, que nous l’aimons, si nous laissions sciemment perdurer de telles erreurs dans la Résistance ? Il nous en aurait demandé des comptes sévères, nous en sommes persuadés. Saint Thomas dit : une volonté qui s'oppose à Dieu est une règle mauvaise, et il est bon de ne pas s'accorder avec elle. Or, nous avons vu en partie II-A que les conceptions de Mgr Lefebvre, même s’il était bien intentionné, s’opposaient sur ce point à la volonté de Dieu. Il ne faut donc pas faire semblant de s’accorder avec Mgr Lefebvre sur ce point. Il faut se démarquer de lui puisqu’il s’oppose ici, sans s’en apercevoir, à ce que Dieu veut. Il est vrai que cela risque peut-être de nous diviser. Mais il vaut mieux prendre ce risque et mettre en sécurité l’éventuelle partition de la Résistance qui verra la vérité (nous espérons bien qu’il n’y a aura pas de partition d’ailleurs), plutôt que de fonder toute la Résistance sur une erreur et sur la compromission du silence.

2) D’autre part, Jésus a dit dans l’évangile de Saint Matthieu X, 26-27 : il n'y a rien de caché qui ne doive se découvrir, rien de secret qui ne doive être connu. Ce que je vous dis dans les ténèbres, dites-le au grand jour, et ce que vous entendez à l'oreille, publiez-le sur les toits. Notre silence, s’il avait continué serait devenu un mensonge grave par omission. Nous n’aurions plus été bénis de Dieu. Et comme le dit Notre-Seigneur, tout finit toujours par être découvert au grand jour.

3) Nous avons vu sur internet un ancien document de l’abbé Célier citant le texte de Flavigny de décembre 1988. Ils connaissent donc ces citations, à Menzingen. Nous trouvons étrange qu’ils n’aient jamais fait d’article prouvant à l’aide de ces citations que Mgr Lefebvre était pour un accord pratique, jusqu’à la fin de sa vie. A notre connaissance, Ennemond, dans son site Credidimus caritati, n’a pas cité non plus ces textes. Nous trouvons ce silence anormal et significatif. Nous avons craint que Menzingen ne garde soigneusement ces citations en réserve jusqu’à la veille de l’accord de la Fraternité avec Rome. Il est fort possible qu’ils aient programmé de faire un article de dernière minute, dévoilant toutes ces citations, pour nous déstabiliser quelques jours avant l’accord. Si nous avions continué d’aduler Mgr Lefebvre sans rien connaître de la vérité, il est fort à craindre que bon nombre d’entre nous auraient alors décidé de quitter la Résistance, tout repentants, parce que nous aurions découvert grâce à Mgr Fellay le vrai visage de Mgr Lefebvre. Nous aurions été si bien conditionnés à l’admirer sans restriction et à le canoniser, que fascinés par l’argument d’autorité -- Mgr Lefebvre l’a dit -- nous serions peut-être devenus du jour au lendemain aussi fervents accordistes que nous étions fervents anti-accordistes auparavant. Il fallait donc anticiper ce danger réel et nous préparer à cette éventualité en étudiant à l’avance si c’était Mgr Lefebvre ou la Résistance qui avait raison. Nous espérons avoir démontré que, concernant les relations avec Rome, Mgr Lefebvre s’est trompé et que nous devons donc préférer la doctrine de Notre-Seigneur à la sienne.
III - Comment devons-nous considérer Mgr Lefebvre ?

III- A Mais Mgr Lefebvre n’est-il pas un futur saint canonisable ? Ne devons-nous pas nous fier à son jugement plutôt qu’au nôtre ?
A notre connaissance, Mgr Lefebvre n’a jamais fait de miracles ni de son vivant, ni après sa mort. Nous devons faire attention de ne pas nous précipiter pour canoniser Mgr Lefebvre. Il est vrai qu’il a été choisi par Dieu pour sauver le sacerdoce catholique et qu’à ce titre, la récompense que Dieu lui a préparée doit être grande. Mais pour être canonisé, il faut avoir pratiqué les vertus à un degré héroïque, il faut vraiment être un modèle en tout. Or, sur le point des relations avec Rome, nous ne pouvons pas dire que Mgr Lefebvre a été un modèle.

Nous avons en préparation un article qui paraîtra cet été et qui montrera également avec certitude que Mgr Lefebvre ne peut pas être le saint Prélat dont parle l’apparition de Quito. En effet, le texte du manuscrit de Quito contient des prophéties très précises sur ce Prélat qui ne se sont jamais réalisées en Mgr Lefebvre. Par exemple, ce prélat est censé aller voir, dans le courant du XXème siècle, un couvent de sœurs à Quito pour les détacher de leur tutelle diocésaine et les remettre sous la tutelle des Franciscains de Quito. Les Franciscains sont présentés d’ailleurs comme des saints par le manuscrit. La réalité est qu’ils sont conciliaires, que Mgr Lefebvre n’est jamais allé voir le couvent de sœurs en question et que ce couvent est toujours sous tutelle diocésaine au XXIème siècle... Nous étudierons en détail cet été le personnage du saint Prélat ainsi que le manuscrit de Quito.
III-B « Comment devrons-nous à présent considérer Mgr Lefebvre en qui nous avons tant de dévotion ?
Il nous semble que nous devons continuer à prier pour le repos de l’âme de Mgr Lefebvre. C’est un devoir de reconnaissance que nous lui devons. Nous pouvons lui demander de nous aider et de nous protéger. A présent qu’il voit les choses comme Dieu les voit, il voit très bien les points où il a eu tort.

Si la Résistance doit se démarquer du Mgr Lefebvre de cette terre et signaler certaines de ses erreurs, cela ne l’empêche pas de se faire un ami du Mgr Lefebvre actuel en priant pour lui et en lui demandant de nous faire voir les choses comme Dieu les voit. Le Monseigneur Lefebvre actuel a la même pensée que Notre-Seigneur en toutes choses.

Il faut laisser à notre avis au blog Credimus Caritati et à Menzingen le soin de faire du lefébvrisme. Depuis le début de notre combat, la Résistance et les accordistes se sont arraché Mgr Lefebvre et se sont sans cesse envoyé des citations contradictoires de celui-ci. Dorénavant, nous allons laisser les accordistes et Menzingen continuer ce travail, mais nous, en conscience, nous ne le pouvons plus. En effet, sur le point des relations avec Rome, des citations, même très bonnes, d’une personne qui avait en même temps les principes erronés que nous avons vus ci-dessus, n’ont plus aucune valeur. Comment accorder du crédit en ce domaine à quelqu’un qui pense que le Protocole du 5 mai 1988 est acceptable ? C’est impossible. Toutes les bonnes citations sur le sujet sont à présent à relativiser, à la lumière de ce que nous avons découvert.

Indépendamment de ces questions très délicates et difficiles des rapports avec Rome, Mgr Lefebvre reste un guide sûr dans de nombreux domaines. Il est un des rares évêques à avoir compris et mis en lumière les ravages du modernisme. Sa dénonciation des erreurs, à la lumière des encycliques anti-libérales est toujours percutante. Ses écrits spirituels et doctrinaux sont précieux. Notre gratitude vis-à-vis de Mgr Lefebvre est grande. Il importe seulement de préciser les fondements doctrinaux de l'attitude que nous devons avoir vis-à-vis de la Rome moderniste. Cela n’a pas été fait et c’est pourquoi la FSSPX vacille. Vingt-cinq ans après les sacres et 44 ans après la fondation de la FSSPX, il semble opportun, avec le recul, de tirer les leçons du passé pour rebâtir solidement.

Une nouvelle question surgit immédiatement : mais alors, sur qui ou sur quoi allons-nous baser notre combat anti-ralliement ? Nous sommes devenus orphelins.
IV- Sur qui ou sur quoi devons-nous baser notre combat à présent, concernant les rapports avec Rome ?
Nous devons baser notre combat sur celui qui a dit : Je ne vous laisserai point orphelins; je viendrai à vous. (Saint Jean XIV, 18) Il est notre tout et, comme nous le dit Saint Jean de la Croix, nous trouvons toutes les réponses en lui et en sa doctrine, qui est la doctrine de l’Eglise. Si nous bâtissons la Résistance sur le Christ et sa doctrine, nous bâtissons sur du roc.

Si nous voulions, sachant ce que nous savons à présent, continuer à fonder notre combat anti-ralliement sur la fidélité à la pensée de Mgr Lefebvre, nous bâtirions sur des sables mouvants car Mgr Lefebvre n’a jamais vraiment répudié le principe d’un accord pratique, même s’il a dit par exemple qu’il était inutile de parler avec Rome tant qu’elle ne reconnaissait pas Quanta Cura etc. Ces paroles n’ont plus vraiment de poids, puisqu’elles ont été contredites ensuite plus ou moins par des paroles ayant une orientation opposée. Comme l’a dit Mgr Tissier le 11 septembre 2013 : « Il l'a dit, mais il ne l'aurait pas fait. »

Nous devons donc nous appuyer davantage sur Notre-Seigneur. Nous ne perdrons pas au change. Nous ne pouvons souhaiter de maître plus sûr, plus saint, plus sage, plus parfait. Etudions-le, lui et sa doctrine. Nous trouverons ainsi toutes les réponses à toutes nos questions.

Un texte du prophète Isaïe (XXX, v.1 à 3) montre comment Dieu considère un accord avec ceux qui n’ont pas la vraie foi. Nous pouvons remplacer le mot pharaon par le mot François et le mot Egypte par les mots Rome moderniste :
 Dieu, ici, blâme les Juifs qui s’étaient alliés avec les Egyptiens. Nous pouvons faire le parallèle avec la FSSPX qui veut s’allier avec François :

« Malheur aux enfants rebelles, -- oracle de Yahweh, qui font des projets, mais sans moi ; qui contractent des pactes, mais sans mon esprit, accumulant péché sur péché.

Ils descendent sur le chemin de l'Egypte, sans avoir consulté ma bouche, pour se réfugier sous la protection de Pharaon et pour s'abriter à l'ombre de l'Egypte !
La protection de Pharaon sera pour vous une honte; et le refuge à l'ombre de l'Égypte, une confusion. (…)

Car ainsi a parlé le Seigneur Yahweh, le Saint d'Israël : par la conversion et une paisible attente vous seriez sauvés ; dans le repos et la confiance serait votre force.

Mais vous ne l'avez pas voulu (…). »