4 mars 2013

[Natalia Trouiller - La Vie] Albert Malcolm Ranjith, l'option administrative

S'il est bien un domaine où le prochain pape est attendu, c'est celui de la réforme de la Curie. Or, dans les différentes listes de papabili que sortent les vaticanistes depuis quelques jours, il est un cardinal sur lequel beaucoup s'accordent, et pas seulement parce qu'il représente la possibilité d'un pape non européen: il s'agit du cardinal Albert Malcolm Ranjith Patabendige Don, archevêque de Colombo (Sri-Lanka) depuis 2009, créé cardinal en 2010. "Extrêmement populaire dans l'aile la plus orthodoxe de l'Eglise, le cardinal Ranjith remplit de nombreuses conditions nécessaires pour être pape", écrit le quotidien sri-lankais The Island. "Connu pour sa sainteté personnelle et ses capacités administratives, il est aussi un diplomate expert du Vatican, qui a servi dans de nombreuses villes à travers le monde. Grandement fidèle au pape Benoît XVI, il a aussi passé du temps dans la Curie romaine comme numéro deux dans le 'ministère' du Vatican sur la liturgie".
 
C'est en effet ses talents d'organisateur et d'administrateur qui ont fait la réputation de cet homme de 65 ans: "Depuis qu'il a pris la direction de l'Église catholique [au Sri Lanka], le cardinal Malcolm Ranjith a veillé à ce que ses ressources soient utilisées efficacement. La rationalisation des nombreux groupes autonomes au sein de l'église, la collecte de fonds pour le renforcement des institutions, la vente de biens immobiliers pour financer les activités ecclésiales sont toujours des tâches difficiles et controversées. Cela a provoqué des ulcères d'estomac chez certains, mais dans l'ensemble, ceux qui profitent de la situation sur le terrain sont impressionnés et reconnaissants des changements qui s'opèrent. Ils ont le sentiment que les ressources provenant tant du gouvernement sri-lankais que de la communauté internationale sont devenues plus disponibles sous l'intendance du cardinal que par le passé".
 
Le vaticaniste John Allen juge Ranjith comme une option "plus convaincante" que son challenger asiatique Luis Antonio Tagle, de dix ans son cadet et "grand vainqueur au buzzomètre" médiatique. Il revient également sur son conservatisme liturgique: "[Entre 2004 et 2008,] Ranjith est devenu quelque chose comme la bête noire des progressistes liturgiques. Il a critiqué la communion dans la main, en disant qu'elle n'était pas envisagé par le Concile Vatican II (1962-65) et ne s'est répandue qu'après son 'introduction illégitime' dans certains pays. Lorsque Benoît XVI a autorisé une plus large célébration de l'ancienne messe latine en 2007, Ranjith a ouvertement fustigé les évêques qui ne se conformaient pas rapidement à sa mise en œuvre, les accusant de 'désobéissance'... et même de 'révolte' contre le pape".
 
Sur Directmatin.fr, on loue ses qualités d'homme proche de ses contemporains. "Il est populaire et proche du terrain: c'est toute la force du cardinal Ranjith. S'il connaît parfaitement les couloirs feutrés du Vatican, il s'est également frotté, notamment quand il était jeune prêtre, aux problématiques contemporaines les plus criantes - développement, alphabétisation - ce qui lui a valu une réelle popularité. Nonce apostolique ("ambassadeur" du Vatican) en Indonésie et au Timor Oriental, il s'était dépensé sans compter en faveur des victimes du Tsunami de décembre 2004. Il est ouvert au monde: l'atout n'est pas mince lorsque la charge pontificale exige désormais de nombreux voyages sous toutes les lattitudes, le cardinal Ranjith parle dix langues : le cingalais, le tamoul, l'anglais, l'italien, l'allemand, le français, l'espagnol, l'hébreu, le grec et le latin. Au cours de son ministère, il a su montrer ses talents diplomatiques, notamment dans la défense des minorités chrétiennes persécutées. Partisan du dialogue interreligieux, il l'a concrètement mis en oeuvre au Sri Lanka avec les bouddhistes, les hindous et les musulmans".