1 juillet 2008

Traditionalistes : Ecône v/Rome, ce qui était réellement en jeu
1er juillet 2008 - Patrice de Plunkett - plunkett.hautetfort.com
Traditionalistes : Ecône v/Rome, ce qui était réellement en jeu
Cette fois, le symptôme est plus précis et l'on voit mieux le fond du problème - qui n'est pas ce que dit la presse.
Ecône refuse encore la réconciliation avec Rome. La FSSPX persiste dans son blocage. Ce n’est pas la première fois.
Mais il y du nouveau.
Comme Le Monde le souligne, le texte d’accord établi par Rome en 2008 était différent des précédents. Au lieu de demander aux lefebvristes de reconnaître précisément Vatican II et la validité du rite ordinaire, il leur a proposé un code de bonne conduite en Eglise, pouvant se résumer ainsi : le traditionaliste admet ne pas avoir une autorité égale à celle du pape, et doit montrer cette subordination par son comportement.
Selon mon confrère HT, cette clause était plus faible – de la part de Rome – que les clauses proposées naguère. HT veut faire croire que Benoît XVI est obsédé par les traditionalistes : donc prêt à n’importe quoi en leur faveur. Cette idée est fausse. En réalité on connaît la position du pape Ratzinger. En tant que berger de l’Eglise, il préférerait que le schisme se résorbe ; mais il ne peut admettre l’attitude d’Ecône. Tout se passe comme si (1) le lefebvrisme pensait savoir, mieux que le pape,  ce qu’il faut à l’Eglise (2) et quoi penser du monde.  Le comportement lefebvriste exhale un complexe de supériorité par rapport au pape. On cherche quel peut bien être le fondement de cette supériorité ; un psychosociologue se demanderait s’il ne s’agit pas d’une attitude  « construite », pour justifier le désir de rester seuls aux commandes en ne rendant compte à personne  - pas même aux plus hautes autorités de l’Eglise.
L’attitude en question ne serait alors qu’un exemple particulier (paroxystique) d’une tentation générale et banale : refuser d’entendre le Magistère sur tel ou tel point.
Dans le cas d’Ecône, il s’agit d’un point crucial : l’autorité intrinsèque du pape, qu’on élude à coups d’arguties, avec pour effet de former une « petite Eglise » séparée de la grande.
Mais dans les autres milieux chrétiens occidentaux, parmi nous autres, chacun n’est-il pas tenté (à d’autres moments, d’une autre façon, dans d’autres domaines) de refuser d’avancer avec la grande Eglise et son chef ? Chacun n’est-il pas tenté d’avoir peur que l’Eglise le mène où il ne veut pas aller, en telle ou telle direction : sociale, économique, politique ? Alors il se bloque : il se dit qu’il est mieux informé que le pape (3). Il s‘appuie sur cette croyance pour ne pas écouter l’Eglise, tout en se déclarant catholique : un peu comme Mme Morano. Je cite son nom parce que c’est l’exemple le plus récent, mais on pourrait en citer d’autres, à droite et à gauche (4) !
N’insistons pas. Voyons seulement qu’Ecône n’est pas seule à souffrir de surdité, même si la sienne est sans intermittences. Et soyons clairs : je n'écris pas pour critiquer qui que ce soit, mais pour que nous nous encouragions les uns les autres à ouvrir les yeux et les oreilles, à respirer l'air du large, et à avancer ensemble. « Au nom des lois de la vie, au nom des promesses de Dieu... »

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(1)  « Tout se passe comme si » est la formule exacte pour décrire le lefebvrisme : il a des comportements mais ne les théorise jamais. Il dit reconnaître le pape mais fait comme si celui-ci n’était pas légitime. Il ne dit pas que le rite ordinaire est invalide, mais dit qu’il ne faut surtout pas le fréquenter. Etc.
(2) Ils disent : « la barque est dans la tempête ». Jésus Christ a déjà répondu : « Pourquoi avez-vous peur, gens de peu de foi ? » (Mt 8, 26). Mais ont-ils peur ou font-ils semblant ?
(3) Comme si les « mots de la tribu » (milieu, métier, parti) étaient plus pertinents que l’information mondiale qui parvient tous les jours au pape !
(4) Ainsi le monsieur qui écrit « convertissons-nous de l’orgueil écologique » : phrase qui contredit (exprès ?) Jean-Paul II appelant à « une conversion écologique » (audience générale du 17 janvier 2001). Non que l’écologie soit une religion, évidemment : mais elle fait partie des devoirs chrétiens en tant que responsabilité. Se dérober à une responsabilité est une faute. Prendre conscience est une « conversion ».   Appeler cela de  « l'orgueil »  est une insulte à la mémoire de Jean-Paul II.