4 mai 2006

L’imprimatur du 22 février
Jean Madiran - Présent  daté du 4 mai 2006 - Mis en ligne par le Forum Catholique - http://www.present.fr/
Peut-être l’avez-vous déjà vu ? Sous le titre Jubilate Deo, cet ouvrage se présente comme un « paroissial au service des prêtres et des fidèles vivant de la liturgie catholique traditionnelle». Il porte l’imprimatur du cardinal-archevêque de Lyon Philippe Barbarin en date du 22 février 2006.

# Ce 22 février 2006 est donc une date historique. Non point parce qu’un tel imprimatur serait absolument sans précédent. Il y avait déjà le « missel quotidien complet », dit « missel du Barroux », préfacé par le cardinal Ratzinger.
Ce qui est à ma connaissance sans précédent, c’est qu’un tel « paroissial » reçoive l’imprimatur dans un diocèse français, et quel imprimatur, quelle primauté d’honneur, l’imprimatur du primat des Gaules !

# Et dans quel esprit véritablement pastoral ! Ce « paroissial » n’est pas dédaigneusement concédé dans l’intention déclarée de se mettre à la portée de malheureux infirmes mentaux dont la sensibilité archaïque reste inexplicablement attachée à des rites périmés.
L’intention déclarée est au contraire de se mettre pastoralement « au service » des prêtres et des fidèles « vivant de la liturgie traditionnelle ». Il n’est pas question non plus d’une autorisation provisoire, pour ménager une transition destinée à tôt ou tard ramener doucement les retardataires à une absorption docile de rites modernisés et démocratisés. Faut-il commenter davantage ?

# Nous recevons ce « paroissial » avec une filiale reconnaissance. Son nom inattendu se réfère à la « paroisse ». Mais je ne connaissais pas ce substantif, c’est une ignorance que je partage avec l’ancien Littré et le nouveau Robert, pour qui « paroissial » est seulement un adjectif. C’est l’adjectif « paroissien » qui peut être aussi un substantif et désigner alors soit une personne (le fidèle de la paroisse) soit un objet (le missel en usage dans la paroisse). Mais enfin, loué soit Dieu, ce « paroissial » est pour la paroisse, la sonorité de son nom indique sa destination, il est pour la célébration de la messe traditionnelle non plus seulement dans quelques monastères, quelques chapelles, quelques prieurés, mais dans les églises paroissiales. C’est le signe annonciateur d’un retour à l’ordre dans l’Eglise de France.
Notre satisfaction n’est pas personnelle, car depuis une quarantaine d’années nous avons fait nous-même ce qu’il fallait pour conserver à notre usage, et selon notre droit méconnu, la messe et le catéchisme traditionnels. Mais il y manquait douloureusement le mandat de l’Ordinaire du lieu. Notre espérance et notre combat spirituel ont toujours appelé le mandat de l’évêque pour que dans les paroisses le catéchisme soit enseigné et la messe soit célébrée conformément à la tradition et à la foi de l’Eglise. On y vient pas à pas, et sans que les tribulations soient vraiment terminées.

# Beaucoup de catholiques pratiquants seront probablement surpris de lire à la page 8 de ce Jubilate Deo :

« Selon la norme générale toujours en vigueur, la communion est donnée sur les lèvres, si possible à genoux…»
— Comment cela, selon la norme générale ?
— Mais oui. La communion dans la main, et debout, a été installée partout, mais légalement elle n’est qu’une exception particulière à la norme générale toujours en vigueur.
On vous l’avait longuement caché.

# Cette norme générale toujours en vigueur utilement rappelée page 8 pour la communion ne l’est point page 7 pour la messe, où le « paroissial » croit nécessaire de continuer à s’abriter derrière l’« indult » de 1984 et celui de 1988. La norme de saint Pie V est pourtant toujours en vigueur pour la messe. A strictement parler, c’est la messe nouvelle qui, par la constitution apostolique Missale romanum de Paul VI (3 avril 1969) n’a reçu en droit que la possibilité d’exister comme une sorte d’exception à la norme jamais abolie. Que cette messe de Paul VI ait été en fait imposée partout dans les diocèses a créé une situation dont on ne peut pas faire comme si elle n’existait pas, mais cela n’a pas créé un droit exclusif ni une norme générale comme la plupart des catholiques pratiquants en restent aujourd’hui encore trompeusement persuadés. Nous aurons sans doute l’occasion d’y revenir d’une manière plus détaillée. A chaque jour suffit sa peine, sa demi-lumière et son cantique.