20 août 2008

D'accord...
20 août 2008 - par Abbé Guillaume de Tanoüarn - leforumcatholique.org
D'accord avec Filsdemarie, ce sermon est certainement l'un des plus achevés qu'ait prononcé Mgr Fellay.

Mais je ne peux m'empêcher de soulever une difficulté...

Il me semble qu'il y a deux discours jusque dans ce sermon. Un premier discours, s'autorisant des prophéties de La Salette disant que Rome perdra la foi, n'hésite pas à proclamer : "Nous assistons à l'apparition d'une nouvelle Eglise, une Eglise qui se prétend catholique, mais qui n'a plus rien de catholique. Elle a ses rites, ses lois, sa Bible, sa manière de faire, mais ce n'est plus ce que l'Eglise a enseigné etc." Dans cette première perspective, l'Eglise qui est à Rome est une Eglise parallèle, ce qui implique que, lui, Mgr Fellay, qui dénonce ce fait, il est la vraie Eglise, il est "le coeur de l'Eglise" comme le disait récemment Mgr Tissier dans The Angelus. Ce discours-là me semble non seulement dangereux (et même prétentieux), mais surtout ecclésiologiquement invalide. On ne peut pas dire, même au nom de La Salette, que l'Eglise qui est à Rome n'est pas la véritable Eglise, mais "une Eglise parallèle", car jamais une deuxième Rome ne nous sera donné. Rome ne se remplace pas.

Dans le fil de son sermon, Mgr Fellay semble mesurer la gravité de ses propos.

Au lieu de continuer à parler d'Eglise parallèle (et donc de deux Eglises), il parle ensuite d'un cancer et de ses métastases. Et là, on a presque l'impression qu'il entre en sympathie, en syntonie avec celui qu'il appelle "le médecin" (je pense qu'il désigne ici le pape, à moins qu'il ne parle de lui-même, mais dans ce cas je jette l'éponge). Et il souligne :"Lorsque les métastases sont partout le médecin arrête. Il n'ose plus prendre son bistouri pour extirper le corps étranger qui se trouve dans cette personne". Le pape, face au modernisme partout présent, est effectivement semblable à ce médecin qui ne peut plus trancher dans le vif, parce que, pour parler comme l'Evangile, il y a risque d'arracher le bon grain avec l'ivraie.

Et Mgr Fellay d'enchaîner, avec un grand esprit surnaturel : "Combien cette situation est difficile, combien il nous faut approcher de cette réalité avec beaucoup de prudence, en se rappelant toujours que nous touchons là à un mystère, dont nous n'avons pas la clé explicative".

Là Mgr Fellay parle d'or.

Mais de grâce, qu'il choisisse une bonne fois l'un ou l'autre discours : on ne peut à la fois déclarer que l'Eglise qui est à Rome a perdu la foi et qu'elle constitue une Eglise parallèle bien reconnaissable et condamnable en bloc et à la fois reconnaître que nous sommes dans un mystère si profond que toute intervention humaine trop tranchante, d'où qu'elle vienne, entraînerait la mort du patient, parce que les cellules cancéreuses et les cellules viables appartiennent au même organisme vivant, qui est l'unique Eglise de Dieu.

Question simple à Mgr Fellay : y a-t-il deux Eglises dont l'une est parallèle à l'autre, ou bien n'y a-t-il qu'une seule Eglise, dont les représentants doivent être traité avec respect quels que soient les reproches que l'on peut leur faire. C'était me semble-t-il toute la question du cardinal Hoyos le 4 juin dernier.
S'il ne veut pas répondre au cardinal Hoyos, auquel il reproche "son impatience", Mgr Fellay se doit de répondre aux fidèles qui lui font confiance et qui ne vivront pas éternellement de deux discours contradictoires.