31 décembre 2004

[Aletheia n°68] Bons points et coups de règle

Aletheia n°68 - 30 décembre 2004
Bons points et coups de règle


Dans Le Sel de la Terre, la revue trimestrielle éditée par le couvent de la Haye-aux-Bonshommes (49240 Avrillé), on trouve toujours des articles qui retiennent l’attention. Ainsi, dans le dernier numéro paru, n° 51, hiver 2004-2005, 14 € le numéro, on peut lire un intéressant dossier, d’une soixantaine de pages, consacré au P. Fahey (1883-1954), spiritain irlandais, théologien du Corps mystique et de la royauté sociale du Christ.
Mais ce même numéro contient aussi, en fin de livraison, huit pages anonymes, qui, sous le titre “ Informations et commentaires ”, sont une distribution de bons points et de coups de règle sur les doigts. Tour à tour, sont cités à comparaître devant les sévères juges d’Avrillé, Olivier Pichon, directeur de la rédaction de Monde et Vie ; Jean Madiran, directeur de la rédaction de Présent ; enfin, le seul et unique rédacteur de cette pauvre Aletheia. On laissera aux deux éminents directeurs des publications citées, le soin de répondre – s’ils en ont le temps et le goût –  à l’honorable rédacteur anonyme.
Concernant Aletheia, l’anonyme du Sel de la Terre me reproche d’être allé “ à la rescousse d’Emile Poulat ”. L’honorable anonyme se récrie : personne n’a jamais laissé entendre qu’Emile Poulat était franc-maçon ou proche de la franc-maçonnerie.
De qui se moque-t-on ? Quand on cite neuf noms, qu’Emile Poulat est le premier nom cité, et qu’après avoir énuméré les neufs noms on poursuit : “ tout ce monde [1] est, d’une part plus ou moins influencé par les idées de Julius Evola ou de René Guénon et d’autre part souvent lié à la franc-maçonnerie ”, il y a bien amalgame et approximation.
Quand on traite de ce genre de sujet par allusion, sous-entendu et amalgame, on n’est pas loin de la calomnie et de la médisance. Le paragraphe accusateur de Christian Lagrave dans Lecture et tradition a été repris textuellement par Le Sel de la terre, puis par Sous La Bannière puis par Action Familiale et Scolaire. On aimerait, pour l’honneur d’Emile Poulat et de Jean Borella, que ces revues publient des rectificatifs sinon des excuses.
Au début du siècle déjà, quand la campagne antimoderniste et antilibérale avait pris une tournure trop personnelle, les Etudes (janvier 1914) avaient publié un article retentissant, “ Critiques négatives et tâches nécessaires ”. La célèbre revue jésuite, qui se revendiquait, elle aussi, au rang des “ catholiques intégraux ”, s’était indignée :
 “ Quelle pitié de voir ravaler ainsi à des questions de personnes les questions doctrinales de la plus haute gravité ! (…) Chaque semaine, le lecteur attend avec impatience son numéro, en se disant : A qui le tour ? Il ne s’inquiète plus guère de ce qu’est le modernisme ou le libéralisme. Foin des graves problèmes, du souci des précisions et des questions de nuances ! L’important est d’enrichir de quelques noms sensationnels la galerie des suspects ! ”.
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Revue des revues
. La presse s’est fait l’écho du “ Communiqué ” de Mgr Bruguès, évêque d’Angers et président de la Commission doctrinale de l’épiscopat, consacré aux ouvrages de Jacques Duquesne et du P. Dominique Cerbelaud. Ce communiqué a été suivi d’une “ Note doctrinale ”, beaucoup plus développée, consacrée au livre de Jacques Duquesne et d’un “ Résumé ” de cette analyse critique. Ces deux dernières interventions de la Commission doctrinale ne sont, pour ainsi dire, jamais citées. On trouvera le texte de ces trois interventions doctrinales dans la Documentation catholique (3 rue Bayard, 75008 Paris – 4,50 € le numéro), n° 2326, du 19 décembre 2004. Une note doctrinale sur le livre du P. Cerbelaud “ devrait paraître ultérieurement ”.
. J’ai rappelé, dans le dernier numéro d’Aletheia, plusieurs articles et études critiques qui avaient été consacrés au premier, et important, livre de Jean Borella, La Charité profanée. Le P. Lous-Marie de Blignières nous rappelle qu’il avait consacré une “ recension respectueuse et critique ” à un autre livre de Jean Borella, Le Sens du surnaturel. Effectivement, cette longue étude critique, de vingt pages, peut se lire dans le n° 61, automne 1997, de Sedes Sapientiæ (53340 Chémeré-le-Roi).
. Dans le numéro de janvier 2005 de La Nef (B.P. 48, 78810 Feucherolles, 6 € le numéro), on peut lire un très important débat consacré à “ La France : mort, déclin ou renaissance ? ”. Y ont pris part Mgr Brincard, évêque du Puy-en-Velay, Paul-Marie Coûteaux, député européen “ souverainiste ”, Patrice de Plunkett et Jean Raspail. Dans ces huit pages très denses, on relèvera, entre autres, ces analyses de Mgr Brincard : “ il y a une crise grave, cette crise est à la fois intellectuelle et spirituelle. Comment sortir de cette crise ? Sera-t-elle l’occasion d’un retour non pas au passé mais aux sources, ou ouvrira-t-elle le chemin au déclin ? Pour ma part, je pense qu’il y aura un renouveau mais, comme tout renouveau profond, il passera par la croix ”.
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Rappels 
. Le dernier livre de Jean Madiran, La trahison des commissaires, publié aux éditions Consep, est disponible aussi à Aletheia au pris de 10 € franco de port.
. Un “ abonnement-liberté ” au quotidien Présent est possible par un prélèvement automatique mensuel de 27,45 € par mois (formulaire à demander à Présent, 5 rue d’Amboise, 75002 Paris).
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Au seuil de cette nouvelle année, je fais mien ce vœu exprimé par Mgr Brincard : “ Retrouvons l’espérance en faisant ce qui, avec l’aide de la grâce de Dieu, dépend de nous ”.
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[1] Souligné par moi.

15 décembre 2004

[Abbé Christophe Beaublat, fsspx - Le Bachais] "Parfois Détruire, Souvent Construire, Toujours Servir!"

Abbé Christophe Beaublat, fsspx - Le Bachais - Novembre - Décembre 2004

"Parfois Détruire, Souvent Construire, Toujours Servir!"
LE BACHAIS
Bulletin du prieuré Saint Pierre-Julien Eymard n°56
Novembre - Décembre 2004
« Le grand mal des temps, c'est qu'on ne va pas à Jésus-Christ..., et surtout à Jésus dans l'Eucharistie. » Saint Pierre-Julien Eymard

Chers Amis et Bienfaiteurs,
Il me semble qu'en cette période de ténèbres, où la Cité de Dieu est attaquée de toutes parts, il est bien nécessaire de faire nôtre cette belle devise du Génie, en lui trouvant des applications dans le combat quotidien.
1) Parfois Détruire
« Interdire au prêtre, parce qu'il est prêtre, l'invective, c'est accepter une image conventionnelle et artificielle du prêtre, qui a son origine ailleurs que dans l'Evangile et dans l'Eglise, étant l'image moderne du prêtre ou plutôt sa caricature bénisseuse, onctueuse, efféminée. Je ne veux pas ressembler à cette caricature dégradante ; je veux garder à portée de ma main le fouet dont s'est servi le Souverain Prêtre, seul vrai modèle des prêtres ministériels »  (Abbé Berto, La Pensée Catholique, n°45-46).
La Cité de Dieu, disais-je, est attaquée de toutes parts : de l'extérieur et de l'intérieur.
De l'extérieur : la découverte récente d'un complot chez nos confrères d'outre-Rhin. Le Cardinal Dario Castrillon Hoyos, engeance de vipère, a été pris la main dans le sac, tramant un ralliement, très limité rassurez-vous, de prêtres allemands, un peu dans le genre de ce qu'il a misérablement obtenu à Campos. La tentative a échoué, et c'est tant mieux : tenons-nous sur nos gardes. Prions pour ces gens-la, bien sûr, discutons avec eux, éventuellement... mais qu'ils évitent de nous prendre pour des benêts !
De l'intérieur : le développement, chaque jour un peu plus facile à constater, d'une maladie qui nous ronge, le cancer gnostique, avec ses tumeurs néopaïennes ou ésotériques. Le fouet, il va donc falloir le manier un peu, sur l'échine des blasphémateurs néo-païens et de leurs affidés, et vous trouverez en pages 4-6 des modèles de tracts à diffuser sans modération.
2) Souvent Construire
7 messes le dimanche, 3 messes avec prédication en semaine, la direction et l'aumônerie d'une école de 54 élèves, l'aumônerie d'une 2e école, des cours de catéchisme pour enfants et adultes, une conférence mensuelle, trois sessions d'étude pour la formation des adultes, un Cercle de Formation des Animateurs mensuel (cadres MJCF, un déplacement mensuel dans les Hautes Alpes (Briançon et ND du Laus), la Croisade Eucharistique, les directions spirituelles, les préparations au mariage et les visites aux   malades (dispersés un peu partout dans les montagnes). Tout cela nous le faisons pour vous, chers amis, car nous aimons vos âmes et que notre plus cher désir est de vous emmener avec nous au Ciel, si Dieu veut.
Je recommande à vos prières notre excellent confrère, Monsieur l'Abbé Juan-Carlos Cériani (du métal dont on fait des épées !), maintenant à Dijon (desservant Besançon), notre 5e mutation en 2 ans (mais ici il n'y a ni pleur, ni grincement de dents : un pet de lapin dans un ciel serein... quoique nous souhaitions tous un peu plus de stabilité...).
Et je vous demande de bien prier pour la nouvelle équipe : Messieurs les Abbés Bruno Duthilleul, Dominique Lagneau, Vincent Grave, et votre serviteur. J'en profite pour manifester ma gratitude pour le soutien des Foyers Adorateurs.
3) Toujours Servir
Oui, chers amis, avec la grâce de Dieu nous nous efforçons de servir. Servir !e Christ-Roi, bien sûr, non pas « servir la soupe » à Alain de Benoist ou Emile Poulat...
« Forteresses missionnaires » (Mgr Tissier de Mallerais), «Bastions de la foi et phares de la chrétienté» (Mgr Lefebvre) : voici ce que sont nos prieurés, et Meylan ne fait pas exception, vous l'imaginez bien, « Le prieuré idéal se trouvera, non en pleine ville, mais à la périphérie et déjà à la campagne, pour garantir au prêtre le recueillement nécessaire et le prémunir contre des visites incessantes de fidèles. La chapelle, située en ville, sera au contraire le lieu privilégié de l'apostolat » (Mgr Tissier de Mallerais, nous Iivrant la pensée du fondateur, in Marcel Lefebvre, une vie, p, 539).
Et vous aussi, chers amis, vous devez vous protéger, vous-mêmes et ceux qui vous sont chers ; « II y a une préservation, un éloignement, une séparation donc un renoncement qui est inévitable si on ne veut pas être contaminé par l'esprit du monde. C'est comme s'il y avait la peste qui se généralise. Une fois qu'on a attrapé la peste, c'est très difficile de s'en sortir. Le meilleur remède, c'est de ne pas l'attraper, de l'éviter. Et pour l'éviter, iI faut prendre des mesures. Eh bien, ici c'est la même chose ! Plus le temps passe, plus la solution pour persévérer, pour nous maintenir c'est l'éloignement, la séparation de ce monde » (Mgr de Galarreta, Sermon des Ordinations, Ecône, 29.06.04, donné in extenso dans Le Sel de la Terre n° 50, automne 2004, pp. 222-228). Et que les esprits superficiels, mondains et libéraux, évitent de dire que cela nuit à l'apostolat, car l'expérience prouve le  contraire : les âmes assoiffées de vérité vont spontanément vers ceux qui leur proposent l'intégralité du message évangélique, sans atténuation ni amoindrissement. Elles se méfient à juste titre des imitations et exigent l'authenticité.
« Intégrisme : si l'on entend par là le respect de l'intégralité du dogme, du catéchisme, de la morale chrétienne, du Saint Sacrifice de la messe, alors oui nous sommes des intégristes. Mais je ne vois pas (...) ce que peut être un catholique qui ne serait pas intégriste dans ce sens-là » (Mgr Lefebvre, in Lettre ouverte aux catholiques perplexes, p. 216, 4 juillet 1984).
Sous l'étendard de l'Immaculée, forte comme une armée rangée en bataille,
Je vous bénis !
Abbé Christophe Beaublat.

Avertissement : le texte qui suit procure, nous l'espérons l'occasion de réduire un peu la morosité.
Néanmoins, dans des cas très rares, il est possible qu'apparaissent des petits signes d'irritation (tremblement, papillotement des paupières, voix saccadée, regard instable, gestes vifs et maldaroits,...). Si cela persiste au-delà d'une semaine, consulter son médecin traitant.

Annexe :
Nous venons de, recevoir un follicule jaune-canari, intitulée Paul Sernine répond à ses lecteurs, aux Éditions du Zébu (!).  Il faut beaucoup d'efforts pour y voir un début de contrition. Le Zébu se garde bien d'aborder le fond de son livre, pour ne considérer que la forme, sur laquelle il aurait été injustement attaqué. J'invite aimablement Sernine, Gricha, Zébu, et pourquoi pas Bozo le clown, Rantanplan ou Casimir (le monstre gentil), à noter les points suivants :

1) dans nos montagnes, aucun arrêté préfectoral n'interdit la chasse au zébu. Or, nous avons enregistré deux messages forts dans Fideliter :
a) La Paille et le Sycomore n'a reçu aucune approbation particulière des autorités du District de France au en tout cas, pas plus et pas moins que Les galipettes de Petit-Ange (cf. Fideliter n°161, septembre-octobre 2004, p. 39).
b) Le débat doit continuer (ibidem, p. 40).
2) A l'occasion du décès de Jean Vaquié (1992), la presse amie, unanime, salua le départ d'un grand monsieur, valeureux combattant anti-libéral et spécialiste incontesté de la Contre-Révolution (entre autres, Monde et Vie, dans son n° 542, texte reproduit par Le Sel de la Terre, n° 50,  2004, pp. 252-253).
3) Dans son sac à malice, Sernine met Jean Vaquié au rang des plus grands pécheurs, responsable des pires corruptions intellectuelles et morales, de ces criminels dont on n'ose à peine prononcer le nom. Tout juste s'il ne propose pas une cellule d'aide psychologique, pour les malheureuses victimes qui auraient été en contact avec l'ignoble psychopathe. Relire très précisément les pages 9, 53-57, 155, 164-166, 174-177, et 183.
4) En pages 179-133, Sernine accuse Jean Vaquié (adversaire irréductible du néo-paganisme) d'être complice de la Nouvelle droite (qu'il dénonce a juste titre comme anti-chrétienne, en donnant plusieurs exemples), et là nous formulons deux hypothèses :
a) C'est du Kolossal humour au 33e degré (peu vraisemblable).
b) C’est, à l'état chimiquement pur, le plus bel exemple de mauvaise foi qu'on puisse trouver, un monument d'hypocrisie ; à découper, agrandir, encadrer, et afficher au mur du Musée de la Désinformafion. Il y a du Voltaire chez cet homme, et ce fameux texte devra figurer en bonne place dans une anthologie du pharisaïsme.
5) Sernine aborde le problème de la Nouvelle Droite, et il semble avoir le haut-le-coeur en imaginant -quelle horreur- une éventuelle collaboration avec ces monstres ! Pourtant...
a) II fait éditer son livre par un ami intime d'Alain de Benoist, chef de file de cette fumeuse école de pensée.
b) Cet ami intime pourfend les «complotistes» et défend Sernine, en plagiant Alain de Benoist (cf. Lecture et Tradition, n" 324, février 2004, pp. 32-34).
c) Les adversaires farouches de Sernine sont tous des bons connaisseurs de la Nouvelle Droite, qu'ils combattent depuis longtemps.
d) Les quelques recensions très favorables dont Sernine a bénéficié sont toutes le fait de «pIumitifs grenouillant» dans la mouvance Nouvelle Droite. On relira avec profit le très instructif chapitre 34 du Libéralisme est un péché (réédité par Avrillé), car Sernine nous apporte un cas d'école idéal NB : «Jamais plus qu'aujourd'hui la lecture de ce livre est nécessaire pour tous ceux qui veulent se désintoxiquer des erreurs du Libéralisme», écrivait Mgr Lefebvre, dans la préface accompagnant l'édition de 1975.
e) Herr professor, Alain de Benoist himself, fin connaisseur, n'a pu que décerner des louanges à son élève. Lisons attentivement ce que, plein d'admiration, il a écrit dans le livret scolaire de ce dernier : «Catholique traditionaliste lui aussi, mais d'une tendance plus raisonnable, Paul Sernine (...) n'a pas de mal à démontrer que ce délire repose sur une «énormité psychologique». Il le fait avec une réjouissante alacrité, assise sur une documentation impeccable» (Éléments, printemps 2004, citation complète reproduite par Le Sel de la Terre, n° 49, été 2004, pp. 201-202). On n'est jamais trahi que par les siens !
6) Après le Bâchais n° 54, j'avais été prié de remettre l'épée au fourreau, ce que j'avais fait immédiatement. Avec le recul, il me semble qu'il y avait eu une petite confusion sur la composition de lieu. En effet la référence scripturaire n'était pas St Mathieu XXVI, 51, mais plutôt Daniel XIII. Alors ?... Sycomore, chêne ou lentisque?
7) Avec l'esprit talmudique qui a soufflé dans La Paille et le Sycomore, il est possible de faire un procès stalinien aux meilleurs d'entre nous . Prenons un exemple tout simple : le dernier catalogue Clovis (novembre 2004, n° 45, pp, 9 et 23). Une intelligence tordue pourrait relever deux faits et les présenter comme « étonnants et inquiétants » :
a) «Voyons donc attentivement cette encyclique Humanum genus, à laquelle nous devons accorder quelque attention, parce que si l'on étudie bien ce qu'est la maçonnerie à l'exemple des papes, on tient la clef de tout ce qui se passe actuellement» (cf. C’est moi l'accusé qui devrais vous Juger, p. 67).
b) La présence d'un auteur, Régis Bayer, bien connu pour ses convictions néo-païennes, et surtout... directeur de collection au Porte-Glaive (cf. Les droites nationales et radicales en France, p, 455), maison d'édition que personne ne connaissait, avant que Sernine n'en dénonce la perversité ! (cf. La Paille et le Sycomore, p. 180)...
8) Nous ne désirons qu'une chose : la Justice. Tant que justice n'aura pas été rendue, avec la réparation proportionnée au scandale occasionné, il y aura une guerre inexpiable. J'ai déjà célébré plusieurs fois les saints mystères pour la conversion de Sernine (motu proprio, ou à la demande de certains fidèles), et je continuerai à le faire. J'attends toujours, avec calme et confiance, le règlement prochain de cette lamentable querelle qui divise la Tradition.

12 décembre 2004

[Aletheia n°67] Mgr Rey : "On ne peut être catholique et franc-maçon"

Aletheia n°67 - 12 décembre 2004
Mgr Rey : “ On ne peut être catholique et franc-maçon ”
Après la claire intervention de Mgr Brincard, évêque du Puy, en 2002[1], un nouvel évêque français, Mgr Rey, évêque de Fréjus-Toulon, rappelle la position traditionnelle de l’Eglise sur la franc-maçonnerie et explique pourquoi l’appartenance à la franc-maçonnerie est interdite aux catholiques. Il le fait dans un long entretien à la revue La Nef, en conclusion d’un important dossier qu’il avait suggéré lui-même à la revue de réaliser.
Mgr Rey explicite trois raisons principales qui rendent condamnable la franc-maçonnerie au regard de la doctrine catholique :
-          Elle diffuse un enseignement de type gnostique : “ Elle prétend donner à ses adeptes une formation ésotérique, enseignement secret qui révèlerait le sens caché de l’univers. Tous les rituels font miroiter aux yeux des initiés l’acquisition d’une soi-disant “ Tradition primordiale ”, et d’une “ Lumière ” qui, au mieux, est celle de l’intelligence humaine, mais en aucun cas celle de la Transfiguration en Christ ”.
-          “ Le maçon soutient le primat et l’autonomie de la raison par rapport à toute vérité révélée ”.
-          “ Elle rejette tout dogme. Elle prône le relativisme, au prétexte de la tolérance absolue. Relativisme religieux qui met toutes les religions sur le même plan, les considérant comme des tentatives concurrentes pour exprimer la vérité sur Dieu qui, en soi, est inatteignable. […] D’autre part, la franc-maçonnerie prône le relativisme moral. Aucune règle morale n’est pour elle d’essence divine, donc intangible. La morale doit évoluer au gré du consensus des sociétés ”.
Dans son entretien avec Christophe Geffroy, Mgr Rey ne s’en tient pas à l’analyse doctrinale et à la mise en lumière des principes erronés et dangereux de la franc-maçonnerie. Il est lucide sur l’influence de la franc-maçonnerie dans la société française : “ Par l’entremise de cercles de pensées et de réseaux d’influence, bien des projets de lois votés par le Parlement ont été préparés dans le silence du temple. ”
D’autres points de cet entretien de trois pages mériteraient d’être relevés, notamment quand, parmi les “ réponses pastorales pertinentes ” à la franc-maçonnerie, l’évêque de Fréjus-Toulon invite les catholiques “ à investir le vaste champ politique, comme le rappelle si souvent le pape Jean-Paul II, à inventer de nouveaux modes d’apostolat sur des terrains autrefois occupés par les mouvements de type Action catholique, mais qui sont aujourd’hui déserts. ”
Le constat sur le “ désert ” et les nécessaires “ nouveaux modes d’apostolat ” ouvre la perspective sur la mission des laïcs. Vaste question où Mgr Rey, là aussi, fait preuve d’une lucidité réconfortante qui tranche avec les discours convenus de l’épiscopat français. 
Le dossier de 12 pages sur la franc-maçonnerie comprend les articles suivants [2] :
. Michel Toda, La franc-maçonnerie hier et aujourd’hui.
. Yves Chiron, Les rituels francs-maçons.
. Paul Airiau, L’Eglise et la franc-maçonnerie.
. Michel Toda, Les chimères du Père Riquet.
. Entretien avec Mgr Dominique Rey : “ On ne peut être catholique et franc-maçon ”.
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Pour l’honneur de Jean Borella et d’Emile Poulat
Plusieurs revues, relayées ou inspirées par des folliculaires internautiques, répandent la rumeur qu’Emile Poulat aurait des accointances avec la franc-maçonnerie. C’est sa direction de la revue Politica Hermetica et son dernier livre, Notre laïcité publique (Berg International, 2003), qui ont suscité cette campagne où l’amalgame rivalise avec l’approximation. Comme je l’ai déjà relevé[3], d’autres collaborateurs de Politica Hermetica ont eux aussi été mis en cause, leur point commun serait d’être “ souvent lié à la franc-maçonnerie ” (on appréciera l’imprécision !), et parmi eux, Jean Borella, collaborateur éphémère de P.H.
Le bon et sérieux dossier de La Nef sur la franc-maçonnerie est l’occasion de prendre à nouveau la défense de ces deux auteurs qui sont aussi des lecteurs bienveillants et attentifs d’Aletheia. Une rumeur non démentie ou une insinuation répétée deviennent des fausses vérités que l’on croit établies.
Jean Borella, philosophe et chrétien, a été un lecteur attentif et critique de René Guénon. Sa recherche spéculative l’a amené à produire des ouvrages importants sur le symbolisme, l’ésotérisme et le surnaturel. On peut contester certains aspects de sa pensée[4]. Mais laisser croire qu’il est franc-maçon est une calomnie et une mauvaise action. À la suite de ma précédente évocation de cette affaire, le Professeur Borella m’avait adressé une lettre dont je crois utile de reproduire la claire affirmation suivante :
Les insinuations de Ch. Lagrave concernant mon éventuelle appartenance à la F.M. sont évidemment fausses. La seule “ organisation ” à laquelle j’ai appartenu et appartiens toujours, c’est l’Eglise catholique, apostolique et romaine. Et, s’il plaît à Dieu, je lui appartiendrai toujours. Je me suis intéressé à la F.M., à son histoire et un peu à sa symbolique. Mais je n’ai jamais remis en cause les condamnations de Rome à son encontre.
Émile Poulat, lui, a protesté, auprès de deux revues qui le mettaient en cause, par des lettres qui apportent des rectifications et précisions propres à faire taire les calomnies. On aimerait que les revues en question publient, par honnêteté intellectuelle, les lettres d’Emile Poulat. Il écrit, entre autres affirmations claires : “ je n’ai et je n’ai jamais eu aucun lien, aucune accointance avec la franc-maçonnerie ”.
Émile Poulat, dans une de ces lettres, revient aussi sur la question de la laïcité et de la loi dite de séparation de l’Eglise et de l’Etat du 9 décembre 1905. À l’approche du centenaire de cette loi, il n’est pas inutile de citer l’état factuel de la question qu’il dresse en réponse à un de ses contradicteurs[5] :
Cette loi dite de “ séparation ”, qui l’a lue dans son texte publié au Journal officiel et aujourd’hui introuvable en librairie ? A-t-elle été condamnée ? Oui, par Pie X trois fois, et une fois par Pie XI en 1924. La condamnation a-t-elle été levée ? Non. L’interdit jeté par Pie X sur les associations cultuelles a-t-il été levé ? Oui, par Pie XI en 1924, au terme de longues négociations et sous la forme d’associations diocésaines. La loi de 1905 est-elle modifiable ? Oui, et déjà une dizaine de fois, la dernière en 1998. Ces modifications ont-elles été condamnées. Non : un modus vivendi jugé satisfaisant à Rome et en France a donc été trouvé dans le cadre d’une loi qui reste condamnée, mais dont la plus grande partie se trouve désormais sans objet et dont le reste a été amendé, interprété ou complété. La réalité qui nous gouverne, c’est le régime issu de cette loi, et d’autres, régime qui, lui, n’a pas été condamné. Le mot séparation lui-même ne figure dans aucun texte de loi et n’a aucune valeur légale : seulement rhétorique.
Sur cette question de la laïcité, le premier mérite d’Emile Poulat est d’être allé aux faits. Comme il l’a fait, depuis quarante ans, dans ses travaux sur le modernisme, sur l’intégrisme et sur l’antilibéralisme de l’Eglise. Ces travaux sont devenus des ouvrages de référence, salués aussi bien dans le milieu historique universitaire que dans les milieux traditionalistes (ou “ intransigeants ” comme disent les Italiens et Emile Poulat). Pourquoi, aujourd’hui, dans une frange de ces mêmes milieux traditionalistes, jette-t-on le soupçon voire la calomnie sur cet auteur ?  N’est-ce pas là une preuve de plus de l’affaissement intellectuel qui touche tous les milieux, y compris les milieux traditionalistes ?
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Mises au point sur Fatima (suite)
Les “ Mises au point sur Fatima ” publiées dans un récent numéro d’Aletheia (n° 65, 21 novembre 2004) ont suscité des réactions diverses. Philippe Maxence, rédacteur en chef de L’Homme Nouveau, me précise que le débat sur la question reste ouvert dans les colonnes de son journal, qui a publié, depuis, des courriers de lecteurs, contradictoires, sur le sujet[6].
M. l’abbé Aulagnier, directeur du site item.snoozland.com, rappelle qu’il avait publié un dossier sur le sujet et il a reproduit mon article du 21 novembre en le résumant ainsi : “ L’article d’Yves Chiron se veut apaisant et nous encourage à nous “reposer sur nos deux oreilles“. […] “Peuples, dormez en paix ! Rien de “ méchant ” ne se prépare à Fatima “ ”.
Le cher abbé, outre qu’il invente des expressions d’un langage familier que je ne permettrais pas d’utiliser dans un écrit, fait un résumé par trop cavalier de mes analyses.
Un lecteur belge, lui, m’accuse de vouloir “ cacher ” (sic) à mes lecteurs un article de Nouvelles de chrétienté (n° 89, septembre-octobre 2004), article de Vincent Garnier “ Les hindous à Fatima ”[7]. Loin de moi l’idée de cacher quelque article que ce soit sur le sujet. Mais, je n’ai pas vocation, ici, à établir des bibliographies exhaustives.    
Depuis, le dossier s’est enrichi d’une nouvelle pièce, une nouvelle “ mise au point ” publiée par Jeanne Smits dans le quotidien Présent, le 4 décembre dernier. Cette fois, elle publie le texte d’un communiqué, important, de Mgr Serafim de Sousa Ferreira, évêque de Leiria-Fatima, qui sonne comme un “ désaveu ” de ce qui s’est passé à Fatima le 5 mai dernier.
Pour clarifier la controverse, qui a pris une dimension internationale, et qui porte sur plusieurs points, on peut, je pense présenter les faits en trois étapes en les plaçant sous leur vrai jour :
- un congrès interreligieux a bien eu lieu à Fatima en octobre 2003. Déjà, au moment des faits, la FSSPX avait mobilisé ses prieurés et ses écoles pour faire prier contre ce “ nouveau scandale d’Assise ”. L’honnêteté pourtant commande de ne pas assimiler les deux événements. À Assise, en 1986, il y eut une réunion interreligieuse, à l’initiative et en présence de Jean-Paul II, pour prier, séparément. À Fatima, il y a eu un congrès d’études, organisé par le sanctuaire, en présence de diverses hautes autorités ecclésiastiques, mais cela ne s’est point fait à l’initiative du Saint-Siège ni sous son patronage. On doit convenir que plusieurs des interventions faites au cours de ce congrès étaient en contradiction flagrante avec la doctrine catholique mais aussi que les déclarations faites en la circonstance par le P. Guerra, recteur du sanctuaire, ont été déformées.
- Un groupe hindou (et non bouddhiste, comme l’écrit par détraction une des publications citées) est venu en pèlerinage à Fatima le 5 mai dernier. Des participants ont pu accéder à l’autel de la Chapelle des Apparitions. Mais, a précisé plus tard le recteur du sanctuaire : “ Le prêtre [hindou] a chanté une prière pendant quelques minutes. Il n’a fait aucun geste, n’a effectué aucun rituel sur ou en dehors de l’autel. ” C’était une prière pour la paix. Même ramené à cette dimension, l’événement reste choquant (on peut en voir des images sur le site du mensuel catholique américain Catholic Family News : www.oltyn.com). Et c’est lui qui, semble-t-il, a suscité la plus grande réprobation du Saint-Siège[8].
- La construction d’un nouveau sanctuaire a bien commencé à Fatima. Ni la chapelle construite sur le lieu des apparitions ni la basilique actuelle ne seront détruites ou abandonnées, le troisième édifice cultuel en construction est dédié à la Sainte Trinité. Reste un point à éclaircir, signalé par Jeanne Smits dès son article du 28 août et rappelé, à juste titre, par M. l’abbé Aulagnier dans son dernier article sur le sujet : un autre bâtiment, appelé “ Centre Paul VI ”, sera construit face à la nouvelle église. Il sera voué, dit le projet, à la “ documentation interreligieuse ”. Le mot peut recouvrir des choses très diverses. Si le futur Centre Paul VI organisait des réunions interreligieuses, et non pas de simples colloques ou congrès, il y aurait un risque de confusion très dommageable pour la foi.
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[1] Mgr Brincard, “ Il faut combattre la franc-maçonnerie ”, entretien accordé à Radio-RCF-Le Puy, reproduit intégralement dans Aletheia, n° 28, 16 avril 2002.
[2] La Nef (B.P. 48, 78810 Feucherolles), n° 155, décembre 2004, le numéro 6 euros.
[3] Aletheia, n° 62, 18 septembre 2004, p. 2-3.
[4] Son premier livre, La Charité profanée, publié en 1979, aux Editions du Cèdre du regretté abbé Lefèvre, avait fait l’objet de deux longues recensions louangeuses, et parfois questionnantes, de Louis Salleron et de Marcel De Corte dans Itinéraires (n° 234, juin 1979, p. 209-218, — photocopie à la disposition des lecteurs qui le souhaiteraient). Quelques années plus tard, j’ai publié un long entretien avec Jean Borella sur ce livre, et sur d’autres sujets, dans la revue L’Age d’Or (n° 5, 1986, p. 16-27, — photocopie à la disposition des lecteurs qui le souhaiteraient). L’abbé Basilio Meramo, de la FSSPX, a publié, lui, Les hérésies de la Gnose du professeur Jean Borella, Editions les Amis de St François de Sales (C.P. 2016 — 1950 Sion 2, Suisse), 1996, une brochure de 42 pages préfacée par Mgr Tissier de Mallerais.
[5] Arnaud de Lassus, “ Emile Poulat et la laïcité ”, Action Familiale et Scolaire (31 rue Rennequin, 75017 Paris), n° 175, octobre 2004.
[6] L’Homme nouveau, 10 rue Rosenwald, 75015 Paris, 4 euros le numéro.
[7] Nouvelles de Chrétienté, Etoile du Matin, 57230 Eguelshardt, 3,50 euros le numéro.
[8] Depuis septembre, la presse portugaise évoque un prochain remplacement du P. Guerra et de l’évêque de Fatima, remplacements que le Saint-Siège aurait instamment demandés.

5 décembre 2004

[Abbé Bonneterre, fsspx - Bulletin de Sainte Germaine (FSSPX)] "Pour la Sanctification des prêtres..."

SOURCE - Abbé Bonneterre, fsspx - Bulletin de Sainte Germaine (FSSPX - Paris) - 5 décembre 2004

Une année eucharistique...

(octobre 2004 - octobre 2005)
... vécue pour la Sanctification des prêtres
Le Saint Père appelle toute l'Eglise à consacrer cette année à la Sainte Eucharistie. Il l'a fait par la lettre apostolique « Mane nobiscum Domine» du 7 octobre dernier. D'une faiblesse doctrinale plus grande que son encyclique « Ecclesia de Eucharistia vivit » (17 avril 2003), le document est « une invitation pressante à s'émerveiller devant ce grand mystère »

Nous ne manquerons pas de souligner les lacunes ou les déviances de tel ou tel passage, cependant nous voulons réaliser les vœux du Père commun : « Puisse l'année de l'Eucharistie être pour tous une précieuse occasion pour devenir toujours plus conscient du trésor incomparable que le Christ a confié à son Eglise » (p.29 de « Mane nobiscum »). Et encore : « En cette année, puisse l'adoration eucharistique en dehors de la Messe constituer un souci spécial des communautés paroissiales et religieuses! Restons longuement prosternés devant Jésus présent dans l'Eucharistie, réparant ainsi par notre foi et notre amour les négligences, les oublis, et même les outrages que notre Sauveur doit subir dans de nombreuses parties du monde »

Voilà pourquoi nous organisons, à Sainte Germaine, une adoration eucharistique tous les jeudis de l'année de 17 h 45 jusqu'à la Messe de 18 h 30, à partir du 1er jeudi de décembre.

Cette adoration. nous l'offrirons pour la sanctification des prêtres

Il y a un temps pour se taire, et un temps pour parler.

Un dernier bulletin paroissial largement répandu prétend qu'il existe dans la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X une « vision surnaturaliste du sacerdoce qui instaure un clivage entre la finalité réelle de la vocation, le ministère auprès des âmes et le but qu'on voudrait lui substituer: la sainteté (qui n'est plus) sacerdotale »

Une double erreur n'aura pas échappé au lecteur attentif de l'article.

l. La reprise de la doctrine de Vatican II exprimée dans le décret sur les prêtres. Le texte conciliaire, largement influencé par le Cardinal Marty (cf. le livre de son fils spirituel, Mr Gilson, sur les prêtres), inverse les finalités du Sacerdoce. Traditionnellement, le prêtre est ordonné pour l'Eucharistie, et ensuite pour la Mission (ministère dans tout son ensemble). Vatican II prétend que le but premier du Sacerdoce est la Mission, et que la Messe apparaît en second, plus comme un moyen de réalisation de l'animation spirituelle du peuple de Dieu. Je cite un seul des passages où ce prêtre exprime une pensée qu'il croit traditionnelle : « Le prêtre est ordonné pour: 1) enseigner la doctrine de la foi, 2) communiquer l'espérance à toute âme, 3) remettre les péchés, 4) offrir le sacrifice et 5) répandre par la prédication et 6) les sacrements, le feu de la charité. L'expression est gagnante, mais dans le désordre! Ce sinistre désordre qui a fait perdre aux prêtres le sens réel de leur identité dans la déroute postconciliaire.

2. La deuxième erreur est le mépris affiché par ce prêtre de toutes les mises en garde des dangers de l'activisme. Personne n'a jamais enseigné dans la Fraternité que le ministère sacerdotal éloignait le prêtre de sa sanctification. Mais il est vrai que le Magistère et les auteurs spirituels ont constamment mis en garde les prêtres contre la surcharge du ministère qui ne peut qu'entraîner l'affaiblissement de la vie intérieure du prêtre et de la -fécondité de son apostolat. Et de cela, les supérieurs de la Fraternité ne peuvent faire fi.

Le Magistère d'abord:

Il y a bien sur la condamnation de « l'américanisme. par Léon XIII dans la lettre « Testum benevolentiae » à l'Archevêque de Baltimore où le Pape fustige ceux qui méprisent les vertus réputées passives et surnaturelles (l'obéissance et l'humilité particulièrement), et qui exaltent les vertus actives: les « maudites œuvres » dont parlent tant et tant d'auteurs spirituels.

Il y a ensuite tous les documents pontificaux réunis dans « Notre Sacerdoce» par Mgr Pierre Veuillot : tout l'enseignement des papes de Saint Pie X à Pie XII (Fleurus 1954).

Le pape Jean-Paul II lui-même dans son livre écrit pour ses cinquante ans de sacerdoce, « Ma vocation, don et mystère» : « Oui, le prêtre doit être avant tout un homme de prière, convaincu que le temps consacré à la rencontre intime avec Dieu est toujours le mieux employé, parce que non seulement il lui est utile, mais il est utile pour sa tâche publique. Si le concile Vatican II parle de la vocation universelle à la sainteté, dans le cas du prêtre, il faut parler d'une vocation spéciale à la sainteté. Le Christ a besoin de saints prêtres! Le monde actuel demande de saints prêtres! Seul un saint prêtre peut devenir un témoin transparent du Christ et de son Evangile dans un monde toujours plus sécularisé.»

Les auteurs spirituels sont unanimes à se faire l'écho des dangers de la dissipation d'un ministère suractif, à commencer par Don Chautard, dans « L'Ame de tout apostolat »

C'est toute la doctrine du Cardinal Mercier dans ses conseils à ses séminaristes et dans ses retraites sacerdotales : « Mes bien chers confrères, cette vie intérieure, pour votre sanctification personnelle et pour l'édification du peuple chrétien, vivez-la; par votre exemple et par votre ministère, propagez-la. » (La vie intérieure, appel aux âmes sacerdotales).

C'est tout l'enseignement de Mère Marie Claret de la Touche dans « Le Sacré-Cœur et le Sacerdoce », approuvé dès 1910 par le Cadinal Merry del Val.

C'est aussi toute la théologie et l'expérience du R.P. Marie-Eugène de l'Enfant-Jésus : « Même le sacerdoce ne confère pas la sainteté, bien qu'il confère une grâce suffisante pour l'exercice de la fonction donnée au prêtre (...) L'apôtre qui a reçu une fonction et une grâce, a donc le devoir de se perfectionner lui-même. il ne peut pas compter absolument sur la grâce qu'il a reçue: il ne doit pas croire qu'il est devenu saint dans l'exercice de sa fonction publique, sous prétexte qu’elle est très importante et très urgente. Il n'a pas le droit de s'y lancer avec témérité sans prendre de précautions, sans se préoccuper des dangers qu'il court (...) On a cru qu'on pouvait se lancer dans cette tâche, et il est arrivé malheureusement ce qui était arrivé à Pierre. Nous avons donc le devoir de sauvegarder notre vie intérieure, de nous perfectionner, de développer cette grâce qui est en nous. » (Recueil de conférences des années 40-50 - «Au souffle de l'esprit» Ed. du Carmel).

Citons même le Cardinal Liénart, qui écrivait en 1952 à l'abbé Courtois:

Dans le tourbillon qui emporte actuellement les prêtres engagés dans l'apostolat actif, il est bon, que dis-je ! il est de toute nécessité que chaque jour, ils enrichissent leur vie intérieure, qu'à chaque instant, ils se rappellent qu'ils sont prêtres et qu'ils doivent en toute occasion agir comme tels. La retraite exposée sous le titre « Qui manet in me » Il est à cet égard d'une grande efficacité. Celui qui s'appliquerait d’en réaliser la doctrine peut être sûr de sa sanctification personnelle et de la fécondité de son action. C'est une promesse de notre Seigneur qui a ajouté : « Et ego in eo, hic ferit fructum multum ».

Ce que rugissait Léon Bloy : « Prêtre, si tu ne te crois pas appelé à la sainteté, à quoi donc te crois-tu appelé, misérable? »

Mais revenons à Monseigneur Lefebvre. Il est surprenant que l'auteur de cet article ne cite que l'ancien archevêque de Dakar. Il y a aussi, - et il y a surtout - le fondateur de notre Fraternité sacerdotale.

Les statuts de la Fraternité, au Chapitre III, §1, sont clairs à propose de la formation sacerdotale: « On veillera à ce que la formation atteigne le but principal: la Sainteté du prêtre en même temps qu'une science suffisante. »

Le Directoire du Séminaire, §3 : « Qui veut la fin, veut les moyens. Celui qui se croit appelé au sacerdoce divin de Notre Seigneur doit mettre tout en œuvre pour devenir un autre Christ et se rendre digne de la grâce et du caractère sacerdotal qui sont donnés par le sacrement de l'ordre. »

S'efforçant de définir l'esprit de la Fraternité (Article 4 - Cor unum 1981-82), Mgr Lefebvre écrivait: « C'est un grave souci pour les supérieurs de Sociétés missionnaires comme la nôtre (...) de constater que certains membres, prêtres en particulier, dévorés par le zèle de l'apostolat extérieur, en arrivent à abandonner le zèle de l'apostolat de la prière, ferment et source de l'apostolat extérieur...

L'apostolat de l'oraison, de la prière, est l'apostolat essentiel qui unit à Notre Seigneur, seule source de grâces de rédemption. L'apostolat extérieur, catéchismes, réunions, conférences, etc.. . deviendront vite stériles, sans l'apostolat fondamental qui maintient une union constante avec Notre Seigneur. »

La phrase finale de « l'Itinéraire spirituel », son testament : « Ce qui importe, c'est que de notre part, nous évitions, dans notre vie sacerdotale, tout ce qui peut être un obstacle à l'efficacité de notre apostolat et spécialement l'abandon de la prière et l'union à Dieu. » (p. 85).

Non, la Fraternité ne change pas, quoique prétendent quelques penseurs égarés par l'esprit d'indépendance, indépendance de leurs supérieur qui les pousse à l'indépendance vis-à-vis du Magistère de l'Eglise, des maîtres de la vie intérieure et de notre vénéré fondateur.

Le seul but du présent article est que cette bouée jetée à la mer leur parvienne. Elle est lancée par un ami qui a déjà vu trop de confrères partir à la dérive, et faire de leur dérive une funeste théorie. Qu'ils sachent, ces frères dans le sacerdoce, que la petite Chapelle Sainte Germaine priera pour eux et pour tous les prêtres de la Sainte Eglise en cette année de l'Eucharistie.

D. BONNETERRE, Prieur